Lettre d’information n° 51. Juillet 2022.

LA LETTRE D’INFORMATION

sur les relations franco-allemandes et l’Allemagne

 

 N° 51. Juillet 2022.

Responsable de la rédaction : Bernard Viale.

Délégué à  la « Communication ».

 Le mot du Président

 

Chers membres de l’AFDMA, chers amis,

La guerre en Ukraine, que nous n’osions imaginer il y a quelques semaines, entraine le monde et l’Europe en particulier, dans une situation bouleversée, aux conséquences encore imprévisibles, qui révèlent nos dépendances dans de multiples domaines.

Par ailleurs, la crise du COVID de ces deux dernières années devait lentement s’éteindre avec les vaccinations et faire partie du passé. Or manifestement, il n’en est rien avec la 7 ème vague qui déferle.

Aujourd’hui, la prudence nous fait dire que non seulement nous ne maîtrisons rien mais surtout que nous ne voyons pas comment éradiquer cette pandémie qui fait, à présent, partie de notre vie sans vraiment comprendre quelles en sont les véritables effets.

Chaque fois que nous pensons avoir fait des progrès dans la sagesse de la conduite du monde et dans une meilleure maîtrise des éléments, les évènements nous appellent à plus d’humilité et à plus d’efforts. Tout ceci semble bien antinomique alors que nos sociétés, qui agitent sans cesse le principe de précaution, réclament toujours plus de jouissances et moins d’effort, plus de droits et moins de devoirs, plus de subsides et moins de travail.

En France, la réélection du Président Macron et sa relation avec le Chancelier Scholz laissent augurer d’une continuité dans la confiance réciproque entre nos deux pays, avec une coopération approfondie. De fait, le conflit ukrainien permet de reprendre conscience de la fragilité de nos organisations. Il a eu le mérite de faire sortir de leur torpeur les dirigeants et de mobiliser la solidarité européenne, animée par le moteur franco-allemand.

S’agissant de la vie de notre association qui a pâti de la situation sanitaire depuis mars 2020, nous sommes décidés de reprendre nos actions même si nos remises de Prix, en particulier aux élèves méritants, et la publication de notre lettre trimestrielle n’ont jamais été arrêtées.

C’est dans ce contexte que nous venons d’apprendre la mise en vente du château de Klingenthal, haut-lieu mythique de l’amitié et de la coopération franco-allemande, où la Fondation Goethe accueillait depuis des décennies des associations et organismes français et allemands dans le seul but de favoriser le rapprochement entre nos deux pays, au service de l’Europe. Notre association a souvent bénéficié de ce merveilleux site, propice aux échanges, en particulier dans le cadre de notre séminaire annuel des délégués régionaux. Que la Fondation Goethe et sa directrice, Mme Stintzi, membre de notre association, soient remerciés pour la qualité de l’accueil et la convivialité qu’elles conféraient à nos travaux et à ceux de nombreuses associations engagées pour l’avenir de l’Europe. Une page de l’histoire franco-allemande se tourne, il nous appartiendra d’en écrire de nouvelles, dans un autre cadre.

En vous souhaitant un bel été et en vous donnant rendez-vous, à la rentrée, pour de nouvelles actions de l’AFDMA, bien cordialement,

Général (2s) Bertrand Pflimlin

Président

 

Sommaire :

Le mot du Président.

P. 3 : Publications : Le défi de la souveraineté européenne, par Cyrille Schott

P. 10 : la renaissance militaire de l’Allemagne : l’augmentation des budgets suffira-t-elle? Par Laurent Griot et Mourad Chabi.

P. 14 : Les manifestations franco-allemandes: le Grand Prix franco-allemand des médias 2022.

P. 15 : Exposition : Dürer, génie de la gravure.

P. 17 : La vie de l’AFDMA

 

 Publications

 

Durant les mois passés, nous avons publié un certain nombre d’articles sur notre site internet www.afdma.fr que nous ne reprenons pas dans cette « Lettre d’information ». Vous les retrouverez en page d’accueil  dans le « carrousel d’articles d’actualité » ou « En direct du franco-allemand ».

Rendez-vous sur www.afdma.fr !

 

Le défi de la souveraineté de l’Union européenne

 

L’agression russe contre l’Ukraine, la guerre d’un Etat contre un autre souverain, que nul ne pensait voir revenir en Europe, a montré l’urgence de la souveraineté de l’Europe.

 Par Cyrille Schott, préfet (h.) de région, ancien directeur de l’Institut national des hautes études de la Sécurité et de la Justice (INHESJ), membre du bureau d’EuroDéfense France. Délégué régional de l’AFDMA pour l’Alsace.

 

Le président français, Emmanuel Macron, prononce en septembre 2017 à la Sorbonne un discours dans lequel il plaide « pour une Europe souveraine, unie et démocratique. » Dans son constat, il souligne que « les passions tristes de l’Europe… se rappellent à nous » et les nomme : « nationalisme, identitarisme, protectionnisme, souverainisme de repli. » Face à ces idées délétères et aux « bourrasques de la mondialisation », il oppose « la seule voie qui assure notre avenir » : « la refondation d’une Europe souveraine, unie et démocratique », en précisant : « L’Europe seule peut, en un mot, assurer une souveraineté réelle, c’est-à-dire notre capacité à exister dans le monde actuel pour y défendre nos valeurs et nos intérêts… »

Un peu plus de quatre années plus tard, la France a assuré, pendant le premier semestre 2022, la Présidence du Conseil de l’Union européenne (UE). Et, après la pandémie, la guerre en Ukraine a souligné l’importance du sujet de la souveraineté. Dressons d’abord l’état des lieux.

La souveraineté de l’Europe : un état des lieux

Si l’Union européenne réunit des éléments d’une souveraineté interne…

Si la souveraineté de l’Europe s’envisage généralement face au monde extérieur, elle doit aussi être située en son sein. Par des traités internationaux successifs, les Etats membres ont créé une Union qui réunit des éléments d’une souveraineté interne.

L’Union européenne, qui n’a pas de durée limitée, possède des institutions remplissant les fonctions exécutive, législative et judiciaire, ainsi qu’une administration. Elle dispose d’un budget, qui comprend, même si leur part est minoritaire, des recettes propres. Elle s’est dotée d’un corps de droit, qui, dans le cas d’un règlement, s’applique directement dans les Etats-membres et, dans celui d’une directive, après transcription dans le droit national.

Certaines politiques, comme la politique commerciale commune ou l’établissement des règles de concurrence relatives au marché intérieur, relèvent de la compétence exclusive de l’Union. De même, la politique monétaire, pour les Etats ayant adopté l’euro. L’Union bat, en effet, monnaie et la Banque centrale européenne est une institution indépendante des Etats.

Les ressortissants des Etats membres jouissent, depuis le traité de Maastricht, de la citoyenneté européenne, qui s’ajoute à leur citoyenneté nationale et les fait bénéficier de droits et libertés, comme la liberté de circulation et de résidence au sein de l’Union ou encore le droit de vote et celui de se présenter partout aux élections locales comme les nationaux.

Une justice européenne a été constituée, avec la Cour de justice de l’Union européenne. Parallèlement aux traités, cette Cour a œuvré par sa jurisprudence à la construction d’une souveraineté interne de l’Union. Elle a posé le principe de la primauté du droit européen, selon lequel ce droit s’impose aux droits des Etats membres. Il doit être respecté par les actes nationaux, quelle que soit leur nature et leur origine, ainsi que par les jurisprudences. La Cour a également promu le principe de l’effet direct, qui permet à un particulier d’invoquer des normes européennes à l’occasion d’un litige avec un Etat ou un autre particulier.

Perpétuité de l’Union, affirmation d’une justice supérieure et d’un corps de droit s’imposant aux Etats membres et valant pour tout citoyen européen, travail d’organes de gouvernement centraux, monopole monétaire dans la zone euro : voilà des éléments de souveraineté interne.

C’est en protestation contre cette évolution que le mouvement souverainiste s’est affirmé. Il a accédé au pouvoir en Europe centrale et est devenu significatif à l’Ouest de l’Union.

… les Etats demeurent souverains.

La souveraineté des Etats demeure. Le Brexit a montré qu’un Etat, qui veut se retirer de l’Union, en a l’absolue faculté.

Le monopole de la violence légitime appartient aux Etats membres. La force publique est placée sous leur seule autorité. Les armées relèvent de l’unique souveraineté nationale. La politique de sécurité et de défense commune n’a en rien modifié cette situation. Elle relève, d’ailleurs, du domaine intergouvernemental où les décisions sont prises à l’unanimité des Etats, comme dans des champs aussi cruciaux que celui de la fiscalité.

Selon la définition du juriste et philosophe Carl Schmitt, la souveraineté tient dans la capacité à décider l’état d’exception. L’Union n’en dispose pas, contrairement aux Etats membres, qui peuvent ainsi s’affranchir de tout droit supérieur. Le Président français peut toujours mettre en œuvre, selon les modalités nationales prévues, l’article 16 de la Constitution.

En résumé, si les Etats membres ont accepté au bénéfice de l’Union une limitation de leurs compétences et donc de leur souveraineté, ils demeurent cependant fondamentalement souverains. De façon générale, le rôle des Etats, spécialement du couple formé par la France et l’Allemagne, est incontournable et décisif dans l’évolution de l’Europe.

Si l’Union européenne est un acteur reconnu des relations internationales…

S’agissant de la souveraineté externe, l’UE est un sujet important du droit international. Elle a conclu des accords commerciaux ou de voisinage avec des Etats, des accords avec des organisations internationales, et contribue, parmi les premiers, à l’aide au développement.

Deuxième puissance économique du monde, elle est membre du G20, qui regroupe les plus grandes économies planétaires, et participe aux sommets du G7. La Banque centrale européenne tient un rôle majeur dans le système monétaire international, l’euro étant devenu la seconde devise mondiale, utilisée dans 39 % des paiements internationaux et constituant, en 2020, 21 % des réserves de change des banques centrales. Du fait de l’importance du marché unique et de sa compétence exclusive pour les règles de la concurrence, la Commission sait imposer ses décisions aux firmes multinationales en matière de fusion, et les sanctionner. De même, en tant que première puissance commerciale, l’Union est en mesure de négocier d’égal à égal avec les Etats-Unis ou la Chine et, si besoin, de prendre des mesures de rétorsion.

Son poids économique et démographique (450 millions d’habitants) lui permet de s’imposer comme puissance normative au-delà de ses frontières, ainsi que le montre la mise en œuvre du règlement général de protection des données. Par une politique volontariste, l’Europe a pris la tête dans la construction aéronautique civile et s’est affirmée comme une puissance spatiale, en contrant notamment, avec le programme Galileo, le monopole du système américain GPS.

L’Union s’est dotée d’une politique étrangère et de sécurité commune (PESC). Elle a créé un Service européen pour l’action extérieure, dirigé par un Haut représentant pour les affaires étrangères et la politique de sécurité. Elle est représentée par 150 délégations dans le monde. Par le biais de la Politique de sécurité et de défense commune, le bras armé de la PESC, elle a déployé en quinze ans 36 missions, militaires, civiles ou civilo-militaires, sur trois continents, et y a engagé près de 80 000 hommes.

… elle ne dispose pas de la souveraineté appuyée sur la puissance.

Quoique acteur significatif des relations internationales, l’UE ne bénéficie toutefois pas de la reconnaissance accordée aux Etats-Unis, à la Chine ou à la Russie. Elle n’est pas un Etat souverain.  Si l’ONU l’accueille en son sein, c’est en tant qu’observateur, tandis que l’un de ses fondateurs, la France, Etat souverain, siège comme membre permanent au Conseil de sécurité. Si elle dispose du Haut représentant pour les affaires étrangères, elle peine souvent dans les crises à définir une position, les Etats membres ne s’accordant pas. Ceux-ci déterminent leur politique extérieure, en tenant leur propre place sur la scène mondiale, ainsi la France, l’Allemagne ou l’Espagne. Militairement, l’Union n’est apte à s’engager que dans des opérations dites de « bas de spectre » et non dans de véritables actions de force.

Il fut un temps où l’Allemagne, divisée, était traitée de géant économique et de nain politique. Cette comparaison vient à l’esprit pour l’Europe, certes créditée du soft power, mais qui ne bénéficie pas de la véritable puissance, celle-ci exigeant, outre le potentiel économique, commercial ou normatif, la volonté politique appuyée sur l’outil militaire et la diplomatie. Or, l’histoire enseigne que la souveraineté doit être portée par la puissance pour être réelle dans les relations internationales.

Des accélérations depuis le discours de la Sorbonne

Des faiblesses révélées par la pandémie se transformant en forces pour la souveraineté

La crise née de la pandémie de la Covid 19 voit d’abord l’Europe en retrait, les Etats membres, compétents dans le champ sanitaire, prenant dans le désordre de premières mesures. L’Union investit cependant rapidement le terrain. D’abord par la réaction prompte d’une institution de nature fédérale, la Banque centrale européenne, qui, dès le mois de mars 2020, annonce l’injection de 1.000 milliards d’euros dans les économies européennes. Ensuite par une décision historique, prise sur le plan intergouvernemental : à la suite d’un accord entre le président Macron et la chancelière Merkel, les chefs d’Etat et de gouvernement arrêtent au Conseil Européen de juillet 2020 un plan de relance de 750 milliards d’euros. Alors que cela lui était interdit jusqu’alors par ses membres, l’Union peut, pour la première fois, emprunter massivement, comme le ferait un Etat souverain, et s’affranchit des contributions des Etats pour son plan de relance. De surcroit, ses emprunts vont créer une dette publique propre à l’UE et un marché mondial des obligations en euros, confortant ainsi le statut international de l’euro.

Après des discussions difficiles, la France et l’Allemagne s’étaient entendues, dans la déclaration de Meseberg de juin 2018, sur la création d’un premier budget de la zone euro. La pandémie a fait passer à l’arrière-plan les débats sur l’euro, qui avaient été vifs. Le travail cependant s’est poursuivi. Le budget de l’UE pour la période 2021-2027 comprend un instrument budgétaire propre à la zone euro, le mécanisme européen de stabilisation des investissements, ainsi qu’un programme d’appui aux réformes, composé d’un outil d’aide à la mise en place des réformes, ouvert à tous les Etats membres, et d’un mécanisme de soutien à la convergence pour ceux qui veulent adopter l’euro. L’accord de Meseberg avait prévu aussi le renforcement du Mécanisme européen de stabilité (MES), avec le filet de sécurité commun, pour éviter une crise bancaire majeure. En 2021, ce filet de sécurité a effectivement été introduit, à travers le Fonds de résolution unique, dans le MES, réformé et musclé. L’euro, instrument de souveraineté, a continué à progresser pendant la crise sanitaire…en silence

Cette crise a révélé aux Européens, dans des domaines déterminants de la souveraineté, leur dépendance. Outre la sanitaire, d’autres dépendances sont apparues, comme celles à l’égard des semi-conducteurs ou des matériaux de la lutte contre le réchauffement climatique. L’Union a investi activement le champ sanitaire, spécialement dans le domaine des vaccins. Des plans ont été lancés, des alliances européennes ont vu le jour pour développer des projets industriels majeurs pour les batteries, l’hydrogène, la nano-électronique ou encore le cloud. A travers son « Pacte vert », lancé en 2019, l’Europe s’est inscrite en pilote dans l’action internationale contre le changement climatique.

Si la fermeture des frontières lors de la pandémie a pu faire penser au repli national, cette clôture, en mettant au jour les contrariétés à la vie des gens qui lui étaient liées, a fait prendre conscience aux Européens du bien précieux qu’était la liberté de circulation.

La pandémie, après un début semblant afficher la faiblesse de l’Union, a finalement permis à celle-ci d’avancer, à l’image des crises passées. De la faiblesse a surgi la force. Tandis que la pandémie occupait l’actualité, sur un autre terrain, Frontex, l’Agence européenne de gardes-frontières et de garde-côtes, dévoilait au début de l’année 2021 les uniformes dont seraient dotés ses agents, appelés à atteindre l’effectif de 10 000. Frontex est devenue ainsi la première unité de sécurité européenne dotée d’uniformes propres.

Dans la même année 2021, si l’arrêt du Tribunal constitutionnel polonais d’octobre a contesté la primauté du droit communautaire, l’espace juridique commun a néanmoins progressé à nouveau, par la création d’un parquet européen chargé de lutter contre les infractions pénales aux intérêts financiers de l’Union, telles que la fraude, la corruption, le blanchiment de capitaux. Les 22 Etats membres ayant adhéré au parquet ont transféré à un organe judiciaire européen indépendant une compétence régalienne et conforté l’Union dans le domaine pénal.

La volonté d’une défense européenne affirmée par la guerre en Ukraine

Face à l’agression russe, l’Alliance atlantique, avec la garantie des Etats-Unis, s’est montrée incontournable sur le plan militaire. Lorsque Heiko Maas, le ministre allemand des Affaires étrangères, s’est exclamé en 2019 : « C’est notre assurance vie ! », il a reflété un sentiment dominant, spécialement en Europe centrale et orientale. Des Etats de l’UE qui ne sont pas membres de l’OTAN, comme la Finlande ou la Suède, pensent désormais à la rejoindre.

Cette situation a toutefois mis à nu la faiblesse européenne quant à sa défense. Or, rien ne dit que l’assurance otanienne sera valable quel que soit le président américain, la situation politique aux Etats-Unis ou le champ d’intervention potentiel. La crise a fait gagner des années à cette prise de conscience : l’Europe ne peut se contenter de la puissance économique et commerciale, mais doit construire sa propre défense. En complémentarité de celle de l’alliance atlantique, comme souligné dans la  déclaration conjointe du 29 octobre 2021 des présidents Macron et Biden, lors de leur rencontre romaine : «…les États-Unis reconnaissent l’importance d’une défense européenne plus forte et plus opérationnelle, qui contribue positivement à la sécurité mondiale et transatlantique et soit complémentaire avec l’OTAN. »

La guerre a provoqué une unité européenne inédite et a montré la force économique et financière de l’UE, par son poids dans les sanctions décidées. Elle a fait voir l’accord des Européens pour l’hospitalité aux réfugiés d’Ukraine, cet accord ne signifiant certes pas l’effacement des divisions passées pour l’accueil de personnes fuyant d’autres continents. Dans le domaine militaire, l’UE, en dégageant un milliard d’euros pour des livraisons d’armes  à l’Ukraine, a brisé un tabou. La clause de défense mutuelle de l’article 42, paragraphe 7, du Traité sur l’Union européenne a été considérée avec un intérêt nouveau par des pays, comme la Finlande et la Suède, voisines de la Russie et non membres de l’OTAN.

La dernière crise, celle du départ du Royaume uni, a permis à l’Europe de réaliser des avancées : mise en œuvre de la coopération structurée permanente, pour développer les capacités de défense ; création de la capacité militaire de planification et de conduite, pouvant préfigurer un état-major opérationnel ; en parallèle à ces initiatives de l’UE, lancement par la France, sur le terrain opérationnel, de l’initiative européenne d’intervention. La création du Fonds européen de défense a inscrit pour la première fois la défense dans le budget de l’UE avec une dotation de 8 milliards d’euros. De même, est apparue dans ce budget la facilité européenne pour la paix, afin de soutenir la politique étrangère et de sécurité commune dans ses actions militaires. Elle a pu être utilisée pour les livraisons d’armes à l’Ukraine. La France et l’Allemagne ont, par ailleurs, décidé le développement avec l’Espagne du programme de l’avion du futur, ainsi que celui du programme du char du combat du futur.

Malgré ces avancées, on reste loin d’une armée européenne et d’une véritable capacité de défense. Pour que l’Europe soit en mesure d’assurer sa défense, elle doit franchir le pas intellectuel de s’assumer, par-delà la puissance économique, commerciale, normative, comme puissance militaire et diplomatique. Cela signifie une force militaire, la capacité de la commander et de planifier, la capacité politique de décision en vue de l’utiliser, tout cela appuyé sur une base industrielle et technologique de défense.

Le Conseil  européen a adopté le 25 mars 2022 la « boussole stratégique », le premier livre blanc européen de la défense et la sécurité. Cette feuille de route prévoit, entre autres, de mettre sur pied une force de réaction rapide de 5.000 hommes, de consolider les structures de commandement, de développer la cyberdéfense et une stratégie spatiale, d’accroitre les budgets militaires des Etats membres. La menace venue de la Russie a conduit à rehausser l’ambition de la boussole stratégique, sans que celle-ci ne retranscrive toutefois la rupture évoquée par le président Macron et le chancelier Scholz.

Dans son adresse aux Français du 2 mars dernier, Emmanuel Macron a déclaré : « … notre défense européenne doit franchir une nouvelle étape… D’ores et déjà, notre Europe a montré unité et détermination. Elle est entrée dans une nouvelle ère… La guerre en Ukraine marque une rupture. » Ces propos ont été en résonance avec la déclaration d’Olaf Scholz du 27 février au Bundestag : « Nous sommes à un tournant historique…la guerre de Poutine marque une rupture. »  Le chancelier a alors opéré un vrai changement de paradigme dans la politique de défense allemande, en s’écartant de cette retenue stratégique qui l’a marquée jusqu’à présent. Il a annoncé, entre autres, un budget de 100 milliards d’euros pour moderniser l’armée allemande. Il a aussi déclaré : « Le défi consiste à renforcer… la souveraineté de l’Union européenne… »

La souveraineté de l’Europe reste un défi, qui peut être relevé

La prise de conscience a eu lieu. Le défi demeure. L’interrogation concerne la traduction concrète que prendront les décisions et intentions nées des crises de la pandémie et de la guerre en Ukraine. L’accroissement des budgets militaires sur le continent permettra sans doute le renforcement annoncé dans la boussole de la base industrielle et technologique de défense, en d’autres termes des industries de défense en Europe. Il pourra aussi entrainer une dépendance accrue à l’égard de l’industrie de l’armement américaine. Comment s’articulera une vraie défense européenne avec la défense atlantique ? La réduction indispensable de la dépendance énergétique à l’égard de la Russie se traduira-t-elle par l’autonomie énergétique de l’Union ou par d’autres dépendances, notamment envers les Etats-Unis, à travers le gaz de schiste ? Les Européens sauront-ils résister aux sanctions extraterritoriales américaines, qui les ont, par exemple, empêché de continuer à entretenir des relations commerciales avec l’Iran après que le Président Trump se soit retiré unilatéralement en 2018 de l’accord nucléaire ?

Dans le domaine du numérique, où aucune des entreprises majeures n’est européenne, la politique de l’Union saura-t-elle changer de dimension face à la poursuite de la montée en puissance concurrente des Etats-Unis et de la Chine et de leur découplage initié sous la présidence Trump et dans lequel s’insère désormais la Russie ? Dans la bataille engagée, si elle stagne dans sa position d’infériorité, l’Europe n’aura le choix que de s’inscrire en position de suiveur, comme pour la défense, dans l’orbite américaine.

A condition de le vouloir et en étant solidaires, les Européens peuvent répondre de façon positive pour leur souveraineté à ces questions, tout en restant fidèles à l’alliance atlantique.

En conclusion, il faut garder à l’esprit que la construction européenne s’effectue dans la dynamique, mais délicate, rencontre du pragmatisme et de l’idéal, dans la composition à trouver sans cesse entre les intérêts des Nations constitutives et les exigences d’une véritable union. Le compromis est, au total, sa marque de fabrique. La résolution de la crise nécessite généralement ce compromis. Et ainsi, elle fait avancer l’Europe. Ensuite, c’est à l’abri du bruit médiatique, comme l’écrit un observateur, que, « avec beaucoup de mécanismes de softlaw, de programmes, de stratégies, de plans d’action…, l’Union européenne tisse une sorte de toile d’araignée pour contraindre les Etats à aller de l’avant, mais c’est un long travail.»[1]

Grâce à leur avance dans l’économie, les sciences, les armes et l’organisation de l’Etat, les Européens, bien que désunis, ont su conquérir au XIXe siècle des empires. Ce temps est révolu. A présent, les Etats-continents, ces nouveaux empires, menacent la souveraineté des Européens s’ils restent dans l’isolement. Par rapport à l’époque médiévale où le sujet de la souveraineté est entré dans l’histoire, la scène où le verdict tombe a changé de dimension, de même que la puissance des acteurs en présence. Alors, la scène était réduite à l’Europe, où des royaumes à l’extension limitée se voulaient souverains face au pape et à l’empereur d’un Saint Empire affaibli. Aujourd’hui, la scène s’est déplacée et est devenue mondiale ; quant aux acteurs envers lesquels l’Europe doit relever le défi de la souveraineté, ce sont des Etats à l’extension continentale et à la puissance planétaire. La souveraineté internationale, pas plus que jadis, ne sera offerte. Elle ne peut s’édifier que dans l’unité face à un « autre », qui par sa force, d’adversaire, de concurrent ou de protecteur, veut imposer sa propre souveraineté. Dans la configuration future de la planète, les Européens ne seront souverains qu’à travers l’Union.

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[1] Henri Labayle, L’embryon de parquet européen est à portée de main, sur le site Internet « Toute l’Europe », 21/01/2015.

Cyrille Schott, avril 2022.

 

La renaissance militaire allemande : l’augmentation des budgets suffira-t-elle ?

Par Laurent Griot, Prof. assistant en géopolitique, et Mourad Chabi, Prof. de RI / géopolitique, Ecole de management de Grenoble.

Article paru dans « The conversation France » le 23.06.2022

 

L’invasion de l’Ukraine a agi comme un électrochoc dans bon nombre de pays européens : la guerre, la « vraie », est à nos portes et nous ne sommes pas prêts. Les débats portent sur nos capacités matérielles comme sur l’équilibre de nos alliances. La Suède et la Finlande ont soumis, mercredi 18 mai, leur demande d’adhésion à l’OTAN, et l’Italie annonce qu’elle rejoindra très rapidement les standards OTAN en termes de dépenses de défense. D’ici à 2028, son budget devrait représenter 2 % de son PIB, passant de 25,9 milliards à 36 milliards d’euros, bien que cet objectif suscite un débat passionné dans le pays.

Au milieu de ce concert de remises en cause stratégiques et budgétaires, il est un pays dont la réaction est encore plus surprenante que celle des autres : l’Allemagne. Surprenante d’abord par la brutalité du constat et la liberté de ton de ceux qui l’expriment : le 24 février 2022, le chef d’état-major des armées allemandes reconnaissait, face au début de la guerre en Ukraine :

« La Bundeswehr, l’armée que j’ai l’honneur de commander, se tient là, plus ou moins les mains vides. Les options que nous pouvons proposer au gouvernement pour soutenir l’alliance sont extrêmement limitées. »

C’est ensuite la réaction du gouvernement allemand qui a de quoi surprendre. Le 27 février, soit seulement trois jours plus tard, le chancelier Olaf Scholz déclarait :

« Face au tournant historique engagé par l’agression de Vladimir Poutine, notre principe est le suivant : tout ce qui est nécessaire pour garantir la paix en Europe sera mis en œuvre. L’Allemagne y apportera sa propre contribution solidaire. […] Nous allons à partir de maintenant, d’année en année, investir plus de 2 % du PIB dans notre défense. […] L’objectif est de disposer à terme d’une Bundeswehr performante, ultramoderne et dotée de technologies de pointe qui nous assure une protection fiable. »

L’exécutif a aussi annoncé la création d’un fonds spécial d’un montant de 100 milliards d’euros pour combler son retard, notamment en matière d’équipement des forces.

Sous-investissement chronique

Pour comprendre la situation budgétaire des forces allemandes, il ne faut pas se fier seulement aux chiffres de ces dernières années. Même si en 2021, la France et l’Allemagne ont consacré des budgets très similaires à leur défense – environ 53 milliards de dollars – ce niveau de dépense est relativement récent en Allemagne.

Si l’on observe les chiffres allemands et français depuis la chute du mur de Berlin, on constate une forte remontée des dépenses allemandes depuis 2018 seulement. La baisse a été constante de 1991 à 2005 (point bas) suivie d’une lente remontée jusqu’en 2018. Ainsi, l’Allemagne a moins investi dans son armée, avec une divergence très nette des trajectoires budgétaires à partir de 2001. De fait, le montant cumulé des dépenses de défense allemandes entre 2001 et 2021 est d’environ 902 milliards de dollars, là où la France a dépensé environ 1 036 milliards de dollars. La différence est donc significative.

Mais cet écart de financement est-il suffisant pour expliquer la situation que nous connaissons aujourd’hui ? Les capacités des forces allemandes sont très réduites, selon leur propre chef d’état-major. Les forces françaises, elles, sont classées par la Rand Corporation parmi les plus efficaces d’Europe, même si elles manquent d’« épaisseur » et donc de capacité à combattre dans la durée. Il nous semble que d’autres facteurs doivent être pris en compte.

En premier lieu, les structures de nos budgets sont différentes. La France dépense de façon constante environ 25 % (26,5 % en 2020) de ses budgets en équipement, l’OTAN demandant à ses membres que ce ratio soit au minimum de 20 %. L’Allemagne a quant à elle dépensé 16,9 % de son budget 2020 en équipement, un montant en nette augmentation depuis 2014 (environ 13 % à l’époque). À l’inverse, les « frais de fonctionnement et de maintenance » pèsent pour 26,4 % du budget français et pour 37,4 % du budget allemand, ce qui représente un quasi-record au sein des pays de l’OTAN. Il s’agit probablement du symptôme d’une autre faiblesse : les armées allemandes sont des monstres bureaucratiques.

Une bureaucratie envahissante

Les forces allemandes souffrent manifestement d’une bureaucratie particulièrement lourde et inefficace. Sur ce point, un document publié début 2020 a eu un retentissement certain dans le pays. Il s’agit du rapport d’information pour 2019 destiné au Bundestag, rédigé par le commissaire allemand aux forces armées de 2015 à 2020, Hans-Peter Bartels.

Selon ce rapport, l’institution militaire allemande souffre de la multiplication des instances de décision, ce qui conduit à une dilution de la responsabilité et à un allongement déraisonnable des processus décisionnels. Bartels consacre par exemple une page entière à raconter comment ses propres services n’ont pas réussi, malgré trois années d’efforts, à obtenir la création pour eux-mêmes d’une dizaine de comptes d’accès au réseau intranet des forces allemandes.

Dans ce texte, l’état-major de la Deutsche Marine reconnaît qu’au sein de l’armée allemande, le respect des règles est plus important que la capacité à fournir des appareils en état de voler, pilotés par des équipages correctement entraînés. Cet état de fait rejaillit sur la motivation des hommes. La troupe considère que ses chefs n’en font pas assez pour améliorer l’efficacité de l’institution. Mais les cadres se sentent désarmés face à la lourdeur de l’organisation.

Parmi les faiblesses les plus criantes, le processus d’équipement des forces est particulièrement critiqué. Il est présenté comme dysfonctionnel, inutilement compliqué et trop long. La volonté de réduire les risques industriels en amont est ouvertement présentée comme une cause de risques pour les troupes, obligées d’aller au combat avec des équipements dépassés, voire en l’absence totale de certains matériels.

Hans-Peter Bartels regrette particulièrement le fait que l’« achat sur étagère » – c’est-à-dire l’achat d’équipements déjà existants n’ayant pas été spécifiquement conçus à la demande de la Bundeswehr – soit une pratique rare au sein des forces allemandes. Même des matériels très simples (comme des sacs à dos) sont soumis à des processus d’élaboration et d’évaluation dignes des systèmes d’armes les plus complexes.

C’est donc autant à des problèmes budgétaires qu’à la question de l’efficacité de ses dépenses que le ministère allemand de la Défense doit faire face. Ce qu’Eva Högl, l’actuelle commissaire parlementaire pour les forces armées, a bien compris : elle demande que le fonds de 100 milliards d’euros destiné aux forces allemandes soit exploité de façon moins bureaucratique.

Mais une telle évolution sera longue et laborieuse. D’abord parce que cette situation est connue en Allemagne depuis très longtemps sans qu’il n’y ait eu de vrai changement. Dans son rapport pour 2019, Hans-Peter Bartels relevait que déjà en 1978 le ministre de la Défense alors en poste se préoccupait de la bureaucratie excessive dont était victime son armée. Ensuite parce que cette situation est sans doute, pour partie au moins, la conséquence de l’approche pacifiste dominante en Allemagne.

Les spécificités de la culture stratégique allemande

Pour d’évidentes raisons historiques, les forces allemandes ont un statut particulier. Elles sont fermement soumises au Parlement allemand et tout est mis en œuvre pour qu’elles ne sortent « plus jamais du cadre démocratique ».

Fondamentalement, l’avenir de la Bundeswehr, sa capacité à surmonter ses faiblesses et à tenir sa place au sein de l’Alliance atlantique dépendra donc de la place que la société allemande entendra donner à son armée. Dans un discours qu’il adressait aux généraux des armées allemandes en 2005, Horst Köhler, alors président du pays, parlait du « désintérêt amical » des Allemands pour leurs armées :

« Après 1945, les Allemands sont devenus un peuple réellement pacifique et qui aime garder une distance prudente vis-à-vis de tout ce qui est militaire. »

Seize ans plus tard, l’opinion allemande ne semble pas avoir beaucoup changé. Chaque année, le centre d’histoire militaire et des sciences sociales de la Bundeswehr publie une étude consacrée à l’opinion allemande sur la politique de sécurité et de défense du pays. L’étude pour 2021 (donc réalisée avant le début de la guerre en Ukraine) confirme cette approche : les Allemands ont confiance en leurs armées. Mais les moyens d’action auxquels ils sont favorables sont diplomatiques (84 %), basés sur le contrôle des armements (72 %), la coopération au développement (70 %) et les sanctions économiques (61 %). Les opérations militaires menées par la Bundeswehr ou les exportations d’armements ne sont approuvées que par 33 % de la population.

Une évolution longue et difficile

La guerre en Ukraine a déjà provoqué une révolution en Allemagne. La célérité et l’ampleur de la réaction politique ont surpris beaucoup d’observateurs des affaires stratégiques européennes.

Berlin a rompu avec une forme de retenue particulière et solitaire en accélérant le déploiement de ses troupes ces derniers temps : envoi de navires en mer Baltique et en Méditerranée, installation de missiles antiaériens Patriot dans plusieurs pays d’Europe centrale, participation à un bataillon au sol en Slovaquie, envoi de chasseurs Eurofighter en Roumanie… Mais il sera long et difficile de renoncer à ce que Tom Enders, ancien PDG d’Airbus, qualifiait en septembre 2020 d’« abstinence de puissance ».

D’abord parce que, passée la stupeur initiale, le soutien de l’opinion allemande à la politique ukrainienne de son chancelier s’effrite : des intellectuels allemands soutenus par des responsables politiques de premier plan demandent que l’Allemagne cesse d’armer l’Ukraine et opte pour une politique visant à obliger Kiev à trouver un compromis avec Vladimir Poutine. Dans le même temps, des représentants syndicaux allemands ont profité de la fête du Travail, le 1er mai, pour dire leur désaccord face à la volonté de réarmement massif exprimée par le chancelier Olaf Scholz. Notamment de peur que cela se fasse au détriment de la paix sociale.

Ensuite parce que la situation stratégique du pays est la conséquence d’une culture politico-administrative faisant partie intégrante de la nation allemande post-Seconde Guerre mondiale. Une évolution de cette position, à supposer que l’opinion allemande y consente, sera très longue, et ses résultats incertains .

 

Les manifestations franco-allemandes

 

 Remise du Grand Prix Franco-Allemand des Médias 2022

 Communiqué de presse du Prix Franco-Allemand du Journalisme. 05.07.2022

La guerre en Ukraine, la pandémie et le changement climatique sont de nouveaux défis majeurs pour les européens et pour le monde entier. Ces crises affectent la politique et la société, les médias, l’art ainsi que la culture. Dans ce contexte, le Prix Franco-Allemand du Journalisme (PFAJ) récompense les journalistes qui, grâce à leurs reportages, éclairent, évaluent et classent, tout en mettant l’accent sur la dimension européenne ou internationale. Le PFAJ est décerné dans les catégories Actualités, Documentaire, Investigation, Prix Spécial et Prix Jeunes Talents.

Par ailleurs, le « Grand Prix Franco-Allemand des Médias 2022 » sera attribué à l’artiste et sculpteur Anselm Kiefer et à l’historienne de l’art Bénédicte Savoy. Tous deux seront honorés pour leurs réalisations en matière de compréhension des peuples et d’échange culturel international.

La cérémonie de remise des prix en aura lieu sur invitation de la Présidente de France Télévisions, Delphine Ernotte Cunci, et de Martin Grasmück, Président du PFAJ et Président de la Saarländischer Rundfunk/ARD, le 6 juillet à 18h au Ministère de l’Europe et des Affaires étrangères à Paris. De nombreux représentants des médias, de la politique et de la culture ainsi que des  invités d’honneur issus du domaine de la coopération franco-allemande y sont attendus.

L’événement n’est pas ouvert au public, mais sera retransmis en direct sur www.dfjp.eu.

Après la remise des prix, l’ambassadeur d’Allemagne donne une réception en l’honneur des lauréats à l’Hôtel de Beauharnais.

Informations sur les lauréats du grand Prix des Médias :

Bénédicte Savoy, née le 22 mai 1972 à Paris, est une historienne de l’art à la renommée internationale. Elle vit à Berlin et à Paris et a été classée, selon le Time Magazine, parmi les cent personnes les plus influentes au monde. En 2018, le président français Emmanuel Macron lui a confié, ainsi qu’au scientifique sénégalais Felwine Sarr, un rapport de recherche sur l’origine des trésors d’art des anciennes colonies. Sur la base de ce rapport 26 objets ont été restitués à la République du Bénin l’an dernier, comme les statues monumentales du Palais Royal d’Abomey. Par ailleurs, Bénédicte Savoy a joué un rôle clé dans l’orientation de ce débat en Allemagne, notamment lors de l’ouverture du Forum Humboldt à Berlin. Entre-temps, l’Allemagne et le Nigéria sont également parvenus à un accord sur la restitution d’importantes œuvres d’art.

Anselm Kiefer, né le 8 mars 1945 à Donaueschingen, est l’un des artistes contemporains les plus importants au monde. De ses premières images en 1969 à son apparition à la Biennale d’art de Venise en 1980 jusqu’à sa plus récente exposition au Grand Palais Éphémère, Anselm Kiefer ne cesse d’impressionner. Artiste protéiforme, il traite dans ses œuvres aussi bien d’histoire que de religion, de philosophie ou encore des grands mythes de l’humanité. Il est parmi les rares artistes capables de traduire en images les catastrophes du XXe siècle et les grands enjeux de la préservation de la création en images. À travers des œuvres d’art monumentales, Kiefer attire l’attention et bouleverse le public depuis des décennies. Plusieurs de ses œuvres sont aujourd’hui exposées au Panthéon. Les immenses vitrines en verre et en acier, dévoilées en novembre 2020, commémorent les victimes et les affrontements sanglants de la Première Guerre mondiale.

© dfjp.eu

La Maison Heinrich Heine

Cité internationale universitaire de Paris, 27c bd Jourdan, 75014 Paris,

reprendra  son programme de manifestations culturelles en « présentiel » ou en « hybride » en septembre.

Pour un aperçu complet, voir www.maison-heinrich-heine.org.

 

Exposition : Dürer, génie de la gravure

Le Château de Chantilly (Hauts-de-France) rend un vibrant hommage au maître allemand de la Renaissance, Albrecht Dürer (1471-1528), rarement exposé en France. Plus de 200 gravures sont à découvrir dans le cadre d’une vaste rétrospective jusqu’au 2 octobre.

Il y a 25 ans qu’Albrecht Dürer (1471-1528) n’avait plus fait l’objet d’une rétrospective aussi ambitieuse en France. Plus de 200 estampes et dessins du maître allemand de la Renaissance sont à découvrir jusqu’au 2 octobre au Château de Chantilly, à une cinquantaine de kilomètres au nord de Paris. L’exposition met l’accent sur l’œuvre gravée, qui est présentée dans sa quasi-totalité. Elle révèle un artiste éblouissant, mais aussi profondément humaniste et novateur qui a contribué à façonner la Renaissance européenne.

Fils d’un orfèvre de Nuremberg (Bavière), Albrecht Dürer est né dans un foyer artistique foisonnant, au cœur d’une Europe en pleine effervescence. L’exposition retrace ses débuts auprès de Michael Wolgemut, peintre, dessinateur et graveur sur bois bavarois et sa formation sur les traces de Martin Schongauer, peintre et graveur de la fin du Moyen-Âge. Elle chemine au gré de ses voyages en Allemagne, de ses rencontres avec des princes et des humanistes, de ses séjours répétés en Italie et aux Pays-Bas.

Chaque rencontre, chaque étape de carrière est pour Dürer une occasion d’assimiler la production de ses contemporains. Il intègre une à une les nouveautés techniques et formelles de son temps. Le plus souvent pour les dépasser.

Un artiste au cœur des échanges de l’Europe de la Renaissance

Apprenti auprès de son père, Dürer avait appris tôt à se servir d’un burin pour reproduire les tableaux de maîtres. Peintre, dessinateur et graveur, il s’est distingué par la perfection de ses dessins d’animaux, basés sur une patiente étude du corps humain, de l’anatomie, de la représentation du vivant.

Il a aussi innové en ouvrant son atelier pour démocratiser l’art. Il s’est confronté sans relâche aux grands artistes de son temps (Mantegna, Raphäel, Léonard de Vinci). Il a suscité en retour leur admiration, de l’Italie à la Flandre et au Saint-Empire. Mais, surtout, il a été le premier à hisser la gravure au même rang que les autres arts.

C’est dans ce domaine, plus que dans tout autre, que son génie a trouvé un terrain pour s’épanouir. La gravure, apparue vers 1400, permettait, pour la première fois en Occident, une large diffusion des images. Dans une Europe où la naissance de l’imprimerie avait accéléré la diffusion du savoir, deux techniques principales s’étaient développées à quelques décennies d’intervalle : la gravure sur plaque de bois, puis à parti de 1440, la gravure sur cuivre. Dürer en maîtrisait tous les outils : gravure sur bois, burin, eau-forte, pointe sèche.

Chefs-d’œuvre universels

L’exposition présente en intégralité ses principales séries sur bois : « La Mélancolie », « Le Chevalier, la mort et le diable », « Saint Jérôme dans sa cellule ». Des chefs-d’œuvre universels, considérés comme révolutionnaires en leur temps. L’exposition les confronte aux grandes œuvres des graveurs contemporains allemands, italiens ou flamands qui ont influencé Dürer ou se sont nourris de son art.

Fruit de l’association de deux collections prestigieuses (celles du musée Condé et de la Bibliothèque nationale de France), l’exposition présente également la série d’illustrations « L’Apocalypse ». Premier grand livre illustré par Dürer, ce chef-d’œuvre réalisé entre 1496 et 1498 était novateur et ambitieux pour l’époque. Il fascine jusqu’à aujourd’hui par son dynamisme et par la puissante expressivité de l’artiste.
A.L.

Albrecht Dürer. Gravure et Renaissance
Exposition au château de Chantilly, Jeu de Paume, du 4 juin au 2 octobre 2022
Des visites guidées sont proposées.

La vie de l’AFDMA

La vie reprend…

 Prochaine réunion du Bureau de l’AFDMA

Elle est prévue en septembre 2022

A l’ordre du jour : Point de situation sur l’association et son fonctionnement,  ses membres, les finances, les activités futures. En 2023, nous célèbrerons le 60ème anniversaire du Traité franco-allemand de coopération et d’amitié.

 Prix de l’AFDMA

Le 5 juillet, Cyrille Schott, Délégué régional de l’AFDMA pour l’Alsace, a remis notre Prix à Matthieu Barnemain, élève du Collège St Etienne à Strasbourg.

Le 25 juin, lors de la « Fête de la Trime » du Prytanée National Militaire de La Flèche, le Prix de l’AFDMA a été remis à Melle Eolyne Moreau.

Comme à l’accoutumée, notre Prix sera également remis à un(e) élève de la Maison de la Légion d’Honneur de St Denis.

Plus d’informations dans notre prochaine « Lettre ».

Pour mémoire, le Prix de l’AFDMA récompense des jeunes particulièrement méritants dans l’apprentissage de l’allemand et engagés dans la relation franco-allemande.

APPEL / RAPPEL

 

La vie de l’AFDMA, ce sont aussi les cotisations de ses membres et de ses amis.

Il semble que la pandémie ait entraîné une sorte de léthargie ou d’oubli chez certains de ses membres.

Merci de penser à la régler pour 2022 !

Le montant a été fixé pour les membres à 35€, et à 25€ pour les amis en 2022, à adresser par chèque à notre trésorier, Bernard Lallement, 142 rue Boucicaut, 92260 Fontenay aux Roses.

Pour tout virement, voici les coordonnées bancaires de l’AFDMA :

Compte n° 08231147386 auprès de la Caisse d’Epargne d’Île-de-France

IBAN : FR76 1751 5900 0008 2311 4738 636.

Merci de soutenir notre engagement.

Site internet www.afdma.fr

Le site internet est régulièrement mis à jour avec des articles d’actualité, souvent rédigés par nos membres, sur l’Allemagne et les relations entre nos deux pays dans le contexte de l’Europe. Voir le « caroussel d’actualité » et « en direct du franco-allemand ».

N’hésitez pas à m’adresser vos articles ou contributions dans le cadre des objectifs de notre association et traitant de l’Allemagne, des relations franco-allemandes et de leur place en Europe.

Page « facebook » de l’AFDMA

Pour mémoire : En plus du site internet «www.afdma.fr », nous disposons d’un outil de communication supplémentaire sous la forme d’une page « facebook », sous l’appellation « Association Française des Décorés du Mérite Allemand ».

Cette page est aussi régulièrement mise à jour et comprend, conformément à la mission de l’AFDMA, des informations sur la coopération franco-allemande, sur l’Allemagne et sur l’Europe. Elle permet une interactivité.

Venez nombreux la visiter et nous faire part de vos avis sur les sujets abordés.