Lettre d’information n° 63. Juillet 2025.
N° 63. Juillet 2025.
Responsable de la rédaction : Bernard Viale.
Délégué à la « Communication ».
Le mot du Président
Les relations entre nos deux pays ont retrouvé le chemin de l’actualité ces derniers mois après l’élection du nouveau Chancelier, qui a réservé, selon une tradition bien établie, sa première visite, dès son élection, à la France. Au nom de l’AFDMA, je lui ai adressé une lettre de félicitations à laquelle il a eu l’amabilité de bien vouloir me répondre. Dans son message de remerciements, le chancelier a souligné son attachement à la coopération et à l’amitié franco-allemande, en nous encourageant à poursuivre notre action.
Les fondements de sa politique, migratoire, budgétaire et de défense s’inscrivent dans les objectifs de la plupart des pays de l’Union européenne et devraient donner un nouvel élan à de nombreux projets de coopération. Cependant, les guerres en Ukraine et au Moyen-Orient, les déclarations très imprévisibles du Président américain, mettent l’Europe face à ses responsabilités : poursuivre son intégration tout en garantissant sa croissance et sa sécurité. La coopération franco-allemande devra plus que jamais apporter la preuve de sa solidité pour perpétuer son rôle de moteur de l’Europe.
Dans le dernier n° de notre « Lettre d’info », nous avons évoqué de nouvelles initiatives franco-allemandes communes dans les domaines de l’intelligence artificielle et de la santé. Un « programme d’action commun sur l’Océan » récemment acté, est venu s’y ajouter. La reprise des travaux de l’assemblée parlementaire franco-allemande est une preuve supplémentaire du dynamisme et de la volonté d’approfondir la coopération entre nos deux pays.
Du côté de la société civile, l’Office franco-allemand pour la Jeunesse et le Fonds commun franco-allemand, dont l’activité avait été fortement impactée lors de la crise du Covid, ont repris et poursuivent leurs actions en faveur du rapprochement et de l’amitié entre nos deux pays, base essentielle d’une confiance réciproque, au-delà de divergences ponctuelles d’intérêt. L’AFDMA y est particulièrement attachée et se félicite de l’action en sa faveur de ses membres, chacun dans son domaine. Qu’ils en soient chaleureusement remerciés !
Très bel été à tous.
Bien cordialement,
Général (2S) Bertrand Pflimlin.
Sommaire :
Le mot du Président.
Publications :
– 1945 : les balbutiements de la réconciliation franco-allemande, par Gérard Foussier.
– Strasbourg, une capitale européenne de la France, par Cyrille Schott.
– Un nouveau livre d’Hélène Miard-Delacroix : les émotions de 1989. France et Allemagne face aux bouleversements du monde.
– Allemagne d’aujourd’hui : La conjoncture en Allemagne au 1er trimestre 2025. Focus sur le marché de l’emploi. Par Isabel Habicht.
En direct du franco-allemand :
– L’assemblée parlementaire franco-allemande a repris ses travaux..
– Un duo en force pour la protection des mers : La France et l’Allemagne adoptent un programme commun d’action sur l’océan.
Expositions :
– Thomas Mann, un écrivain dans le siècle.
– Exposition : à la découverte de Gabrielle Münter.
La vie de l’AFDMA :
– La lettre de notre Président au nouveau Chancelier.
– Remise du Prix de l’AFDMA à Strasbourg.
Publications
Durant les mois passés, nous avons publié un certain nombre d’articles sur notre site internet www.afdma.fr que nous ne reprenons pas dans cette « Lettre d’information ». Vous les retrouverez en page d’accueil dans le « carrousel d’articles d’actualité » ou « En direct du franco-allemand ».
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1945 : Les balbutiements de la réconciliation franco-allemande
Par Gérard Foussier
Il y a 80 ans paraissaient les premiers exemplaires de Documents et Dokumente – un « pont de papier » qui, au fil du temps, est devenu un pilier du dialogue franco-allemand. L’histoire de la revue est bien plus qu’un symbole.
Comme souvent, l’histoire commence par une anecdote. Plus qu’une anecdote, une parabole presque. Nommé aumônier militaire auprès de la garnison française stationnée à Offenburg en 1944, c’est dans cette ville proche de la frontière franco-allemande, en zone d’occupation française donc, que le Père Jean du Rivau (1903-1970), ordonné prêtre en 1936, résistant de la première heure, déporté à Mauthausen et à Dachau, avait été témoin des dures réalités de la vie quotidienne dans une Allemagne vaincue, détruite et ruinée. Selon une première version, il aurait rencontré un soldat français communiste désireux de traverser le Rhin de Ludwigshafen vers Mannheim pour voir s’il y avait d’autres communistes de l’autre côté. L’autre version fait état d’une rencontre de deux soldats sur ce même pont, se saluant en sifflotant l’Internationale. Pourquoi laisser aux seuls communistes le privilège de renouer le dialogue entre Français et Allemands ? se serait alors demandé l’aumônier français. Peu importe de savoir si cette anecdote est véridique. Elle traduit sans conteste un nouvel état d’esprit. Ce sera en effet le début d’une belle aventure, avec la publication dès l’automne 1945, moins de quatre mois après la fin des hostilités, de cahiers détachables, intitulés respectivement Documents et Dokumente, mais aussi, un peu plus tard, avec l’envoi d’enfants de réfugiés allemands dans des familles françaises et l’ouverture d’une librairie à Offenburg pour faire connaître la production littéraire française et d’une autre à Strasbourg pour la production allemande.
D’aucuns soulignent, avec raison, que Documents et Dokumente étaient, dès leur création, de « faux jumeaux », car les contenus de ces deux revues parallèles étaient différents. Néanmoins l’intention, elle, était la même. Il s’agissait avant toute chose d’aller à la rencontre des adversaires d’hier, d’engager le dialogue avec eux pour évoquer et comparer les expériences des uns et des autres, sans ignorer pour autant les drames vécus dans chacun des deux pays par des populations que l’Histoire qualifiait d’ennemis héréditaires. Pour le Père du Rivau, le pardon chrétien se devait d’être à la base d’une volonté, pas forcément évidente en 1945, de réconciliation politique.
La première structure créée en 1945 à Offenburg s’appelait le Centre d’Information et de Documentation Économiques et Sociales (CIDES) avant de devenir l’année suivante le Centre d’Études Culturelles, Économiques et Sociales (CECES). En 1949, ce Centre obtient un statut juridique et devient bicéphale – en France sous le nom de Bureau International de Liaison et de Documentation (B.I.L.D.) et en Allemagne sous le nom de Gesellschaft für übernationale Zusammenarbeit (GüZ). Ces deux institutions sont aujourd’hui les plus vieilles références du franco-allemand d’après-guerre, pourtant rien n’indique dans leur intitulé qu’elles visent à un rapprochement entre la France et l’Allemagne. Il est surprenant d’ailleurs de constater que B.I.L.D. et Güz, depuis leur Centre commun d’Offenburg, n’ont rien fait pour mettre en valeur leurs ressemblance, lorsqu’ils se sont baptisés de la sorte, alors que dans le même temps, ne serait-ce que par leur titre, Documents et Dokumente donnaient, à tort, l’impression d’être une seule et même revue. De même, il est permis de philosopher sur les intentions des initiateurs, lorsqu’en allemand ils ont préféré le ü (übernational) au i (international) de la partie française, mettant ainsi en exergue la vocation « supranationale » de l’association. Peut-être que le choix français obéissait à la tentation bien légitime d’associer l’institution à un mot allemand (Bild, image) qui caractérisait à cette époque l’apparition d’une presse dominée par l’image (le quotidien populaire à grand tirage Bild-Zeitung, a été fondé la même année en Allemagne).
D’abord réunies sous un même toit à Offenburg, les deux rédactions déménagent à Cologne en 1956, ville dans lequel le directeur administratif s’appelait Max Adenauer, fils de Konrad le chancelier, bien avant donc que le général de Gaulle, revenu au pouvoir en 1958, ne lance avec le vieux chancelier le processus de réconciliation historique scellé en 1963 par le Traité de l’Elysée. Finalement, la GüZ s’installe avec la rédaction de Dokumente à Bonn, pendant que le B.I.L.D., après de longues années à Strasbourg, s’installe en 1976 avec Documents à Paris. Deux adresses, deux revues – pourtant les efforts d’harmonisation, après une longue période d’autonomie éditoriale, seront de plus en plus nombreux, les responsables des deux associations estimant que le rapprochement n’était pas l’apanage des années d’après-guerre.
Suite à un douloureux désengagement unilatéral du ministère français des Affaires étrangères, les deux revues décident en 2010 de fusionner. Ainsi, sous un seul titre, Dokumente/Documents reprend le flambeau, avec le précieux soutien financier du ministère allemand des Affaires étrangères, tout en restant fidèle à sa vocation : informer en français sur l’Allemagne, informer en allemand sur la France.
Conçue dès 1945 pour que les Français apprennent à ne plus craindre l’Allemagne après la défaite nazie, la revue française était devenue au fil des ans non plus seulement une Revue des questions allemandes, mais avant tout une Revue du dialogue franco-allemand, comme sa consœur allemande. Dokumente, à ses débuts, était une revue conçue et réalisée par des Français qui traduisaient des textes allemands, pour la plupart déjà publiés dans certains organes de presse. Avant la fondation de la République fédérale d’Allemagne en 1949, seules les instances d’occupation alliée avaient pouvoir de décision. Et il n’est de secret pour personne que les activités du Père du Rivau n’ont pas toujours été du goût des autorités françaises, qui ne cachaient guère leur volonté d’affaiblir l’Allemagne nouvelle, quand d’autres prônaient une démocratisation de la société allemande. Face au soutien frileux, notamment financier, de la politique française, l’aide de l’Eglise pouvait apparaître comme un précieux recours. Mais les rapports difficiles et tendus entre les jésuites allemands et la Compagnie de Jésus ont compliqué le travail du Père du Rivau, qui a dû se battre pour que la Compagnie ne cesse pas son soutien au Centre d’Offenburg.
C’est sûrement une des raisons pour lesquelles la double revue, créée dans un esprit d’ouverture fortement marqué par les réseaux catholiques, avec pour auteurs des religieux essentiellement, a rapidement instauré le dialogue avec les laïcs en nommant dès 1950 un Alsacien à la tête de la rédaction, qui saura avec plusieurs personnalités faire entrer la publication dans un processus de sécularisation, aussi bien dans le choix des auteurs que dans celui des thèmes abordés.
Au fil des ans, les responsables ont poursuivi le dialogue intensément intellectuel dans les milieux universitaires et associé désormais chercheurs, experts et journalistes dans un même effort d’information sur ce qui rapproche (et sépare) Français et Allemands. La revue a par conséquent toujours pris garde de gérer sa mutation et son adaptation aux incessants changements de la société et des rapports bilatéraux. Mais l’ambition est la même qu’en 1945. Jean du Rivau l’affirmait : « Notre but en publiant ces divers documents est uniquement de servir et de renseigner de part et d’autre sur les faits et gestes de l’un et l’autre. Nous ne voulons pas prendre parti, nous désirons simplement éclairer les uns et les autres par des textes et permettre un jour venant de commencer à parler. » Le dialogue donc pour mieux lutter contre la propagande des années de guerre.
Très vite, la vocation des deux revues dépassera la seule relation franco-allemande pour prôner une dimension européenne. « La réconciliation faite, l’accent franco-allemand n’a de sens que s’il sert de moteur, d’accélérateur à l’Europe », écrira Joseph Rovan, président du B.I.L.D. (de 1985 à 2001), résumant ainsi les premières années d’activités dans un numéro spécial intitulé « Un héritage au service de l’Europe ». Jean du Rivau quant à lui reste le symbole de cette initiative : premier Français à avoir été décoré (en 1954) de la Grande Croix de l’Ordre du Mérite de la République fédérale d’Allemagne, décoré de la Légion d’Honneur par Robert Schuman, c’est lui qui a célébré une messe à la mémoire de l’ancien chancelier Konrad Adenauer en la cathédrale Notre-Dame de Paris en 1967, geste symbolique certes, mais dépassant le seul caractère religieux de la cérémonie.
Depuis 2018, une version en ligne sur Internet (dokdoc.eu) remplace la version papier de la revue (devenue bilingue en 2010 sous le nom de Dokumente-Documents). Ce nouveau chapitre de l’évolution des relations franco-allemandes ne se limite pas aux différents formats successifs de la plus ancienne des publications franco-allemandes. L’autre volet de la réconciliation lancée en 1945 concerne en effet les rencontres de jeunes organisées par les deux associations BILD et GüZ dans le but d’informer, de réunir et de coopérer en assurant la promotion de l’apprentissage linguistique tout en favorisant les activités de loisir, afin de procurer aux jeunes des deux pays de vivre des vacances studieuses ensemble tout en découvrant la langue et la culture du partenaire – pour ainsi mieux le comprendre au travers de ce qu’il vit et de ce qu’il réalise. Les deux associations proposent sur plusieurs sites en France et en Allemagne 15 séjours pour jeunes de 9 à 18 ans, ainsi que deux programmes de formation pour jeunes adultes, tous encadrés par des équipes d’animation franco-allemandes. Ces activités sont d’ailleurs reconnues par l’Office franco-allemand pour la Jeunesse (OFAJ) qui apporte son soutien depuis sa création en 1963. A juste titre, le couple BILD-GüZ peut s’enorgueillir d’avoir montré l’exemple en étant le précurseur de l’OFAJ. Paris et Berlin auraient tort aujourd’hui de sous-estimer l’importance de cette histoire binationale, qui n’a rien d’une anecdote.
Gérard Foussier,
Président du BILD de 2005 à 2024, rédacteur en chef de Dokumente-Documents de 2005 à 2017. Ancien directeur de la rédaction française de la « Deutsche Welle ».
NDLR : le BILD héberge l’AFDMA pour ses réunions du Bureau et des Délégués régionaux. Avec nos remerciements renouvelés.
Strasbourg, une capitale européenne en France
Par Cyrille Schott
Ce jour-là, l’ensemble des conseillers maîtres, en formation de chambre du Conseil, était rassemblé dans la Grand ’chambre du palais Cambon, le siège de la Cour des comptes. Le train à grande vitesse entre Paris et Strasbourg figurait à l’ordre du jour. Le rapporteur mettait en délibération un avis dans lequel pointaient bien des réserves à l’égard d’un projet reliant la capitale à une ville de province éloignée, du lointain est de la France. Je demandai la parole. Je me levai et soutins que cet investissement avait une dimension européenne, que le TGV irait au-delà du Rhin, que Strasbourg n’était pas une ville de province quelconque, mais une capitale européenne qui devait être convenablement reliée à la française. Mes collègues étaient gens bien élevés. Sans qu’ils eussent besoin de me contredire, je perçus dans le regard de ceux installés près de moi l’indulgence polie et légèrement navrée à l’égard d’un Alsacien incapable, selon eux, d’élever son raisonnement au-delà de l’attachement à sa région natale.
A la vérité, je ne fus pas vraiment surpris. Je me souvins d’une conversation que j’eus, alors que j’étais préfet d’un département sous le gouvernement de Michel Rocard, avec l’un de ses importants conseillers, lui-même d’origine alsacienne, mais convaincu par les arguments technocratiques développés en tant de milieux parisiens, selon lesquels la logique voulait que l’on regroupât à Bruxelles les institutions européennes et donc que l’on y déplaçât le Parlement de Strasbourg. Tel fut également le sentiment dominant des auditeurs de l’Institut national des hautes Etudes de la Sécurité et de la Justice (INHESJ), que je dirigeais entre 2014 et 2016, et qui s’exprimait lors des visites d’information que nous réalisions annuellement à Bruxelles. Ces courtes vues sont hélas si répandues.
Or, Strasbourg est, oh combien, capitale européenne !
Strasbourg, capitale de la « grande Europe » et cité des Droits humains
Le 8 août 1949, se réunit dans les salons de son hôtel de ville le fondateur Comité des ministres du Conseil de l’Europe, qui a été créé par le traité de Londres du 5 mai 1949 et qui constitue la première organisation européenne issue de la volonté de tourner définitivement le dos aux horreurs du passé. Deux jours plus tard, le 10 août, dans l’aula de l’Université de Strasbourg débute sa première Assemblée parlementaire. Winston Churchill va y assister. Dans son discours de Zurich le 19 septembre 1946, il avait appelé à « reconstituer la famille européenne » et à « ériger quelque chose comme les États-Unis d’Europe », dont « le premier pas pratique… prendra la forme d’un Conseil de l’Europe. » Il va appeler, en français, à une « Europe unie » devant les Strasbourgeois venus l’écouter en masse et avec enthousiasme sur la place Kléber, la principale place publique de la ville.
Une année plus tard, le 4 novembre 1950, le Conseil de l’Europe, qui s’est établi à Strasbourg, enregistre un premier succès majeur : l’adoption de la Convention européenne des Droits de l’Homme à Rome. Inspirée par la Déclaration universelle des Droits de l’Homme votée par l’Assemblée générale des Nations Unies en 1948 à Paris, elle va beaucoup plus loin, en ouvrant une révolution politique et juridique : elle prévoit la création d’une Cour pouvant être saisie par toute personne résidant sur le territoire d’un Etat membre. La Cour européenne des Droits de l’Homme, appelée en abrégé la Cour de Strasbourg, voit le jour en 1959. Le Palais des Droits de l’Homme, conçu par l’architecte britannique Richard Rogers et construit entre 1992 et 1994, abrite aujourd’hui les 47 juges élus par l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe et qui veillent à ce que les droits fondamentaux des personnes résidant sur le territoire de l’un de ses Etats membres soient effectivement garantis. Depuis sa création, la juridiction a rendu plus de 16 000 arrêts, qui ont abouti à de nombreuses modifications de législation et ont renforcé l’Etat de droit en Europe. Elle fait de Strasbourg la cité des Droits humains.
Lorsque les pays d’Europe centrale et orientale font tomber le joug des dictatures, le Comité des ministres du Conseil de l’Europe crée en mai 1990 la « Commission européenne pour la démocratie par le droit », communément appelée « Commission de Venise », du nom de la cité où elle fut conçue. Cette Commission va accompagner de façon décisive l’évolution institutionnelle de ces nations vers la démocratie et l’Etat de droit, ainsi que leur accueil au sein du Conseil de l’Europe. Elle va rayonner au-delà du continent, en diffusant son patrimoine constitutionnel, de sorte qu’elle comprend désormais 61 Etats membres, dont 15 non européens.
La Russie en ayant été exclue en 2022 après son agression de l’Ukraine, le Conseil de l’Europe réunit 46 Etats, peuplés de 675 millions d’habitants. Il promeut une action commune dans les domaines économique, social, culturel, scientifique, juridique et administratif, en veillant à la sauvegarde et au développement de la démocratie. Il siège dans le Palais de l’Europe à Strasbourg, faisant de cette ville la capitale de la « Grande Europe », en tant que cité de la démocratie et de l’Etat de droit.
Strasbourg, ville de naissance des symboles de l’Europe
Le drapeau européen bleu azur aux douze étoiles d’or a été adopté par le Conseil de l’Europe en 1955, avant de l’être en avril 1983 par le Parlement européen, et de devenir ainsi l’emblème de notre Union européenne. Il a été conçu à Strasbourg par Arsène Heitz, un Alsacien dessinateur de talent, qui servait au sein du service du courrier du Conseil de l’Europe.
C’est également à Strasbourg que le Conseil de l’Europe décide en 1972 de faire de l’« l’Ode à la joie » de Beethoven son hymne, à la suite d’une proposition du « comité sur les autorités territoriales » présidée par le strasbourgeois René Radius. C’est en 1985 que les chefs d’État et de gouvernement, réunis en Conseil européen, l’adoptent comme symbole officiel de la Communauté économique européenne, qui deviendra l’Union européenne.
Les symboles de l’Europe sont nés à Strasbourg.
Strasbourg, capitale législative de l’Union européenne
Lorsque la Communauté européenne du Charbon et de l’Acier, la CECA, se met en place, son Assemblée commune s’installe à Strasbourg dans les locaux du Conseil de l’Europe. Issue de la Déclaration du 9 mai 1950 prononcée par Robert Schuman, ministre français des Affaires étrangères, dans le salon de l’Horloge du quai d’Orsay à Paris, cette Communauté réunit les industries de guerre sous une autorité européenne unique. Elle signifie la réconciliation entre la France et l’Allemagne et, au-delà, ce miracle de la paix inscrit dans le chemin, initié par les six Etats membres, qui va mener à l’Union européenne. L’accueil de cette Assemblée parlementaire, dont va naitre, lors des évolutions successives de la construction européenne, le Parlement européen, constitue un symbole puissant : c’est autour de Strasbourg et de l’Alsace que la France et l’Allemagne se sont affrontées, que l’Europe s’est déchirée. Et c’est là, autour du Rhin, qu’elle s’est retrouvée, que le miracle de la paix s’est accompli !
Le Parlement européen dispose depuis 1999 de son propre palais, appelé modestement le bâtiment Louise Weiss, une splendide expression de l’architecture contemporaine. C’est là qu’il se réunit en session plénière une fois par mois, sauf durant le mois d’août, avec des pouvoirs renforcés depuis son élection au suffrage universel en 1979 et particulièrement par le traité de Lisbonne, entré en vigueur en 2019. Lors de la session plénière, organe suprême de décision, se déroule la discussion finale, sont adoptés les textes, sont posées les questions à la Commission ou au Conseil, se tiennent les débats d’urgence, sont présentées les déclarations de la présidence. Cette session focalise l’attention des médias.
C’est à Strasbourg qu’a été élue, sur proposition du Conseil européen, la présidente de la Commission européenne et qu’est soumis à un vote d’approbation chacun des 27 commissaires proposés par les Etats membres, en accord avec la présidente élue de la Commission. C’est à Strasbourg que cette présidente prononce son discours annuel sur l’état de l’Union. C’est à Strasbourg que le Parlement peut, par le vote d’une motion de censure, contraindre la Commission européenne à démissionner.
Ces pouvoirs, législatif et de contrôle, s’expriment à Strasbourg, même si les commissions du Parlement se réunissent le plus souvent à Bruxelles, où se tiennent aussi des « mini sessions ». Strasbourg est la capitale législative de l’Union européenne.
C’est là aussi que les consciences du Monde, comme Nelson Mandela, sont récompensées par le prix Sakharov du Parlement européen, le « Nobel de la paix européen », que se lèvent les voix célébrant l’Europe, comme celles des papes Jean-Paul II et François, qu’est rendu l’hommage solennel à un grand Européen comme Helmut Kohl. C’est là que les dirigeants des Etats membres viennent présenter, devant le Parlement, leur vision de l’Europe.
Strasbourg, au cœur de la défense européenne
L’Eurocorps a été créé en 1992 à l’initiative de François Mitterrand et de Helmut Kohl. Fort de plus de 1000 militaires, cet état-major multinational de niveau corps d’armée, auquel participent six nations cadres, la plus récente étant la Pologne, et cinq associées, est capable de commander, pour l’UE ou pour l’OTAN, 60 000 soldats. Il occupe deux quartiers à Strasbourg.
Non loin, dans le Pays de Bade, à Müllheim est situé l’état-major de la brigade franco-allemande, créée en 1989 à l’initiative des deux mêmes hommes d’Etat, et dont l’une des unités, le 291e Jägerbataillon allemand, tient garnison à Illkirch-Graffenstaden, dans l’agglomération strasbourgeoise. Forte de 6000 hommes, la brigade est placée dès le temps de paix sous le commandement opérationnel de l’Eurocorps, dont elle constitue la capacité de réaction initiale.
Strasbourg abrite encore d’autres institutions européennes, comme le Médiateur Européen, la chaine culturelle européenne de télévision Arte, le site opérationnel de l’Agence européenne pour la gestion opérationnelle des systèmes d’information à grande échelle au sein de l’espace de liberté, de sécurité et de justice (eu-LISA), qui gère notamment le système d’information Schengen et le système d’information des visas.
Strasbourg, où souffle l’esprit de l’Europe, fait rayonner la France
Opposer Strasbourg à Bruxelles s’apparente à une faute de l’esprit. La ville belge est la capitale européenne où siègent la Commission et le Conseil de l’UE. C’est la capitale de l’Exécutif, la ville où les responsables politiques et les techniciens de l’Union élaborent les projets et les compromis permettant à l’Europe d’avancer. Son rôle est incontournable et doit être salué. Il est parfois ingrat. Cette capitale est la cible de tous ceux qui n’aiment pas l’Europe. Elle incarne, à son corps défendant, ce que certains vilipendent comme « l’impérialisme européen ». Si Bruxelles en devenait la seule capitale, la perte serait immense pour l’Europe, le coup serait terrible pour l’Europe ! Ne resterait comme capitale qu’une ville qui ne peut incarner le rêve d’Europe.
C’est à Strasbourg que celui-ci s’incarne. Le cœur de l’Europe bat à Strasbourg, où s’est écrite l’histoire du miracle de la paix. Elle est la capitale où souffle l’esprit. Le partage des rôles entre Bruxelles et Strasbourg est indispensable à l’équilibre de l’Europe, à sa place dans l’imaginaire des peuples. L’Europe dispose de trois capitales, Bruxelles, Strasbourg et Luxembourg pour la justice. Son histoire et sa nature même veulent qu’elle soit polycentrée.
Que cette capitale européenne soit située sur le sol de la France représente une chance immense pour notre pays et son rayonnement. Partout en Europe et au-delà, Strasbourg est connue et les événements qui s’y déroulent bénéficient d’un écho continental, voire mondial. Les Présidents et gouvernements français, en ne cessant de soutenir la vocation européenne de Strasbourg, semblent l’avoir compris. Il reste qu’à Paris, dans les régions, parmi les élites, au sein même de la population française, Strasbourg est d’abord vue comme une métropole régionale, mais est méconnue dans cette essentielle dimension européenne. Puisse ce texte éclairer des lecteurs.
Cyrille Schott, préfet honoraire de région, Conseiller maître (en SE) honoraire à la Cour des comptes, co-auteur du livre Souveraineté et solidarité, un défi européen. Ancien directeur de l’Institut national des hautes études de la sécurité et de la justice. Délégué de l’AFDMA pour l’Alsace.
Un nouveau livre d’Hélène Miard-Delacroix : Les émotions de 1989.
France et Allemagne face aux bouleversements du monde.
La certitude d’assister aujourd’hui à un moment de bascule dans les équilibres du monde dessine la fin d’une ère qui a commencé en 1989-1990, dans l’incrédulité, l’inquiétude mais aussi dans une joie intense. Plus encore que les changements réels qu’elle a entraînés, c’est le souvenir d’émotions puissantes qui fait la postérité de 1989.
Mais cette mémoire est tellement dominée par l’incroyable joie à la chute du mur de Berlin qu’on en oublierait presque que la fin de la RDA et l’unification allemande en 1990 ont été précédées de tant de peur et d’indignation, à Tian’anmen, à Leipzig, à Prague, puis à Bucarest et Timisoara.
Hélène Miard-Delacroix retrace dans ce livre la dynamique avec laquelle, entre émerveillement et espoir, les Européens ont eu l’impression d’assister à un jeu de dominos et parfois de subir les événements.
En prenant ensemble la France et l’Allemagne, ce récit révèle des circulations inattendues d’émois dans un chœur aux voix nombreuses. Il montre que les émotions sont un moyen d’appréhender le changement et une ressource de l’action publique.
Partagées, elles peuvent aussi révéler et consolider des communautés de culture et de valeurs dans un moment de grands ébranlements.
Editions Flammarion
Hélène Miard-Delacroix est professeure d’histoire et de civilisation allemande à Sorbonne université. Elle est la déléguée régionale de l’AFDMA pour Paris et l’Île-de- France.
Allemagne d’aujourd’hui
Nous vous recommandons particulièrement la lecture sur notre site internet (www.afdma.fr) de l’article « La conjoncture en Allemagne au 1er trimestre 2025 : focus sur le marché de l’emploi », par Isabel Habicht.
L’analyse focalise spécialement sur le marché du travail en Allemagne au cours du dernier trimestre 2024 et sur les plus récents chiffres du début de 2025.
Elle s’intéresse à l’évolution de la population active, aux actifs par secteur, à la place des femmes sur le marché du travail, aux problèmes démographiques.
Elle pose la question où travaillent les gens et regarde où et comment les immigrés notamment ceux de ladite crise de 2015 ont trouvé du travail mais aussi oùle Fachkräftemangel (manque de main-d’œuvre qualifiée) se fait sentir le plus.
Elle s’intéresse aussi à la vague de licenciement chez les grands employeurs qui se profile et dans quelles branches elle menace des emplois en Allemagne. Elle examine des marchés plus favorables qui pourront employer les masses dans l’avenir comme les énergies vertes et les Umwelttechniken (tech vertes).
Le sommaire du dossier N° 252, « les élections anticipées en Allemagne du 23 février 2025 », a été publié dans le n° précédent de notre « Lettre d’information ».
En direct du franco-allemand :
L’assemblée parlementaire franco-allemande a repris ses travaux.
L’Assemblée parlementaire franco-allemande s’est réunie lundi 16 juin à Paris pour la première fois depuis les élections législatives en France et en Allemagne. La présidente du Bundestag, Julia Klöckner, a plaidé pour une « nouvelle dynamique européenne ».
« Le partenariat franco-allemand est la force motrice du projet européen. Nos deux Parlements y contribuent d’une manière particulière. Je souhaite intensifier cet échange », avait-elle déclaré lors de sa première visite officielle à Paris, début juin. Ce lundi 16 juin, la nouvelle présidente du Bundestag, Julia Klöckner, était de retour dans la capitale française. Elle a coprésidé la 11e séance plénière de l’Assemblée parlementaire franco-allemande (APFA) avec son homologue française, Yaël Braun-Pivet.
Il s’agissait de la première réunion plénière de l’APFA depuis un an et demi. L’institution, composée de 50 députés du Bundestag et de 50 députés de l’Assemblée nationale, avait interrompu ses travaux en raison des élections législatives anticipées en France, puis en Allemagne.
Après une introduction des présidentes, la séance a débuté par un débat d’actualité sur les perspectives de la coopération franco-allemande. Puis, l’APFA a auditionné Marc Ferracci, ministre français de l’Industrie et de l’Énergie, et Katherina Reiche, ministre fédérale de l’Économie et de l’Énergie. Elle a examiné les propositions de textes et les amendements déposés.
Julia Klöckner pour une nouvelle dynamique européenne
Dans son introduction, Julia Klöckner, a plaidé pour l’approfondissement de la coopération franco-allemande et pour « une nouvelle dynamique européenne ». Elle souhaite que les décisions et propositions de résolutions de l’APFA soient plus fréquemment soumises aux Parlements français et allemand. Face à la menace étrangère qui pèse sur notre sécurité et face à « la contestation des systèmes démocratiques », une coordination est plus que jamais nécessaire entre des amis et voisins « qui ne se contentent pas d’être sur la même longueur d’ondes mais peuvent aussi se renforcer à travers le travail parlementaire », a-t-elle affirmé.
La présidente du Bundestag constate une volonté de coopérer pour relancer l’Europe en France et en Allemagne. Ordre de paix européen ébranlé par la guerre d’agression russe en Ukraine, perte de confiance des citoyens envers l’Europe et les responsables politiques : « l’Europe est sous pression », a-t-elle exposé. Il faut, selon elle, travailler à rétablir la confiance. « L’Union européenne doit faire la preuve de sa capacité d’agir », notamment par des réformes de simplification de la bureaucratie et par des décisions pragmatiques au service de la population.
Prix parlementaire franco-allemand
En fin de séance, les parlementaires ont lancé l’édition 2025 du Prix parlementaire franco-allemand. Créé en 2004 et doté de 20 000 euros, il récompensera dorénavant les projets issus de la société civile contribuant à une meilleure compréhension mutuelle ou au renforcement des relations franco-allemandes.
A.L.
Un duo en force pour la protection des mers : L’Allemagne et la France adoptent un programme commun d’action sur l’Océan
En adoptant un programme d’action commun sur l’Océan, l’Allemagne et la France veulent porter de l’avant avec ambition la protection des mers ; une déclaration intergouvernementale a été signée à cet effet lors de la Conférence des Nations Unies sur l’Océan à Nice.
L’Allemagne et la France veulent porter de l’avant avec ambition la protection des mers à travers un programme d’action commun sur l’Océan. Le ministre fédéral de l’Environnement Carsten Schneider et la ministre française de la Transition écologique Agnès Pannier-Runacher ont signé à cet effet une déclaration intergouvernementale aujourd’hui, à l’occasion de la Conférence des Nations Unies sur l’Océan à Nice. Par cette déclaration, les deux gouvernements s’engagent notamment en faveur d’une ratification et d’une mise en œuvre rapides de l’accord de protection de la haute mer des Nations Unies, d’un accord des Nations Unies visant à réduire la production de déchets plastiques, d’une pause de précaution dans l’exploitation minière sous-marine, de la décarbonation du trafic maritime et d’un renforcement de la recherche marine. Une autre priorité de l’accord est la récupération des vestiges de munitions gisant dans les mers. Nice accueille en ce moment la Conférence des Nations Unies sur l’Océan, le plus important sommet international consacré à la protection des mers.
Le ministre fédéral de l’Environnement Carsten Schneider a déclaré : « L’amitié franco-allemande est vivante, et dans le domaine de la protection des mers, elle est plus forte que jamais. Les mers ne connaissent pas de frontières nationales, tant en ce qui concerne les habitats étendus qu’elles abritent que les défis qui pèsent sur elles. C’est pourquoi la coopération internationale est si importante pour assurer le succès de la protection des mers. L’Allemagne et la France s’investiront à l’avenir plus encore que par le passé, tant en Europe qu’à l’international, pour une protection des mers renforcée. L’une de nos priorités communes sera la récupération de vestiges de munitions qui rouillent au fond des mers et mettent en danger l’environnement. Pour un avenir positif pour nous tous, il nous faut des mers saines. »
Dans le cadre du processus pour un accord des Nations Unies contre les déchets plastiques, l’Allemagne et la France s’engagent en faveur d’une approche globale et contraignante, qui prend en compte l’ensemble du cycle de vie des plastiques. Les négociations entreprises à Busan, en Corée du Sud, à la fin de l’année dernière n’ayant pas abouti, elles seront poursuivies à Genève en août. Des entretiens préparatoires sont menés à Nice. S’agissant de l’exploitation minière des fonds marins, l’Allemagne et la France sont favorables à une stricte application du principe de précaution (« pause de précaution »). Aucune exploitation minière sous-marine ne doit être entreprise jusqu’à nouvel ordre, étant donné que les connaissances sur les écosystèmes des abysses et sur les possibles conséquences de leur exploitation minière sont encore largement insuffisantes.
Dans leur programme d’action commun sur l’Océan, les deux gouvernements confirment leur engagement à atteindre l’objectif, convenu par la communauté internationale, de placer au moins 30 pour cent des zones marines sous protection d’ici à 2030. L’Allemagne et la France s’engagent par conséquent à défendre le renforcement des écosystèmes marins et de la pêche durable, le soutien à des initiatives pour une politique maritime basée sur la science, le développement d’une IA durable pour les océans, la décarbonation du trafic maritime et une mise en œuvre ambitieuse du pacte européen pour l’Océan.
Les deux gouvernements conviennent également de se saisir du problème des munitions coulées au fond des mers. Des technologies et méthodes innovantes pour récupérer et éliminer de manière sûre les munitions sur le fond marin doivent être développées et testées. Le gouvernement fédéral a déjà lancé le premier programme au monde de récupération et de destruction des vestiges de munitions dans la mer du Nord et la mer Baltique. Ce programme enregistre des avancées positives et il est prévu de le doter d’une enveloppe de 100 millions d’euros. Le pacte européen pour l’Océan qui vient d’être publié par la Commission européenne prévoit également le développement d’une stratégie de récupération des munitions à l’échelle de toute l’UE.
La Conférence des Nations Unies sur l’Océan se tient à Nice jusqu’au 13 juin. On y attend l’adoption par consensus d’une déclaration qui, accompagnée d’une liste d’engagements volontaires des États, constituera le « Plan d’action de Nice pour l’Océan ».
Programme action franco-allemand sur l’océan, adopté à l’occasion de la Conférence des Nations Unies sur l’Océan à Nice (en anglais)
La Conférence des Nations Unies sur l’Océan (UNOC) a lieu à Nice du 9 au 13 juin 2025. Il s’agit du plus important sommet international pour la protection des mers, qui a vocation à mettre en œuvre l’objectif de développement durable pour la vie aquatique (ODD 14).
Le gouvernement fédéral entend poursuivre trois priorités lors du sommet de Nice : premièrement, progresser en direction d’un accord international qui limite les déchets plastiques dans les mers ; deuxièmement, avancer concrètement dans l’octroi du statut d’aires marines protégées en haute mer ; et troisièmement, gagner de nouveaux alliés à la cause d’une « pause de précaution » en matière d’exploitation minière sous-marine. Les États participant à la Conférence des Nations Unies sur l’Océan adopteront le Plan d’action de Nice pour l’Océan, composé d’une déclaration politique et d’une liste d’engagements volontaires. Le gouvernement fédéral entend apporter sa contribution à travers tout un bouquet de mesures, comprenant notamment la protection des aires marines de l’Allemagne en mer du Nord et en mer Baltique, la création d’un fond pour la protection des milieux marins ou le programme d’action immédiate – le premier à l’échelle mondiale – pour la récupération et la destruction des vestiges de munitions en mer du Nord et en mer Baltique.
Expositions
Thomas Mann, un écrivain dans le siècle
Prix Nobel de littérature, voix de l’Allemagne en exil sous le nazisme, conscience morale : Lübeck célèbre le 150e anniversaire de la naissance de Thomas Mann (1875-1955). Une exposition retrace l’engagement démocratique d’un auteur aussi incontournable qu’actuel.
La Mort à Venise, La Montagne Magique, Les Buddenbrook : son œuvre a nourri l’imaginaire de générations de lecteurs. Le 6 juin 1875, l’écrivain Thomas Mann (1875-1955) voyait le jour à Lübeck (nord de l’Allemagne). La ville hanséatique célèbre aujourd’hui son 150e anniversaire à travers une cérémonie en présence du président allemand, Frank-Walter Steinmeier, et l’inauguration d’une exposition. Ce sont les temps forts d’une riche année de commémorations qui souligne l’actualité de ses engagements. Lauréat du Prix Nobel de littérature en 1929, Thomas Mann a aussi été la voix de l’Allemagne en exil sous le nazisme et une conscience morale écoutée.
L’écrivain naît dans une famille de commerçants lübeckois. Il s’inspire de son enfance pour écrire son premier roman, et premier succès, Les Buddenbrook (1901). Il y fait le récit de l’effondrement d’une grande famille de commerçants de la Hanse dont la descendance est davantage attirée par les arts que mue par le goût des affaires. Lui-même préfère la voie de la littérature au commerce, tout comme son frère aîné Heinrich Mann (1871-1950). La mort prématurée du père, en 1891, facilite les choses. Elle conduit la famille Mann à s’installer à Munich. La rente tirée du patrimoine familial permet une existence autonome.
Itinéraire d’un démocrate
En 1905, Thomas Mann épouse Katia Pringsheim, fille d’une riche famille d’intellectuels. Ils ont six enfants. Trois d’entre eux deviendront écrivains (Erika, Klaus et Golo Mann). Thomas Mann fait ainsi le choix d’une existence bourgeoise. Simultanément, il donne libre cours à ses fantasmes homoérotiques dans son journal, ou dans la nouvelle La Mort à Venise (1911) qui met en scène un professeur tombant amoureux d’un jeune garçon sur fond de lagune.
Politiquement, il est monarchiste. En 1914, quand la Première Guerre mondiale éclate, il en est un ardent partisan de l’entrée en guerre. Un conflit éclate avec son frère Heinrich, qui est au contraire un fervent pacifiste. En octobre 1918, Thomas Mann fait encore l’éloge de la politique militaire impériale dans les Considérations d’un apolitique. Mais il change radicalement de position après l’avènement de la République de Weimar (1919). Il défend celle-ci sans ambiguïté dans un discours (« Von deutscher Republik ») le 13 octobre 1922. Il se mue en un fougueux défenseur de la démocratie.
C’est aussi à cette période qu’il termine la rédaction de La Montagne Magique (1924), considérée comme son œuvre maîtresse. Ce roman d’un millier de pages, écrit entre 1912 et 1923, se déroule dans un sanatorium de Davos, dans les Alpes suisses. Il met en scène à travers ses personnages les grands débats sociaux et existentiels : la science, la foi, la politique, la mort et la vie, le désir et l’amour, la guerre et la paix. En 1929, Thomas Mann reçoit le Prix Nobel de littérature. C’est une consécration.
Mais l’écrivain ne reste pas longtemps en paix. Il voit venir le danger qui guette l’Allemagne. En 1930, trois ans avant l’arrivée d’Hitler au pouvoir, il prononce un réquisitoire enflammé contre les nazis. La même année, il publie la nouvelle Mario et le Magicien, qui peut se lire comme un avertissement contre les structures du totalitarisme. Au printemps 1933, au terme d’une tournée de conférences à l’étranger, il choisit de ne pas rentrer dans l’Allemagne désormais hitlérienne. Un long chemin d’exil débute. Il le mène en Suisse, puis via le sud de la France aux États-Unis. L’Allemagne nazie lui retire la nationalité allemande en 1936.
Voix de l’Allemagne en exil
À partir de 1938, Thomas Mann enseigne à Princeton. En 1942, il déménage à Los Angeles. Sa résidence à Pacific Palisades, face à l’océan Pacifique, devient le point de rencontre de nombreux intellectuels et artistes allemands en exil, d’Albert Einstein à Bertolt Brecht en passant par Theodor Adorno et Arnold Schönberg. Le bâtiment, largement épargné par les récents incendies de Los Angeles, a été racheté en 2016 par l’État allemand. Il est devenu pôle de rencontres et d’échanges culturels et politiques entre les deux rives de l’Atlantique.
Aux États-Unis, Thomas Mann rédige la trilogie Joseph et ses frères et Le Docteur Faustus. Mais surtout, il s’engage. Entre 1940 et 1945, il s’adresse à ses concitoyens restés en Allemagne à travers 58 allocutions « aux auditeurs allemands ». La BBC les diffuse en Allemagne. Thomas Mann y défend les valeurs de la démocratie. Il expose sa conviction qu’elle gagnera. Il informe aussi ses auditeurs de l’existence des camps de concentration, et les met en garde contre les conséquences morales de leur silence. Après la capitulation de l’Allemagne nazie, il décide de rester aux États-Unis. En 1952, le vent du maccarthysme le pousse toutefois à rentrer en Europe, en Suisse. Il s’éteint le 12 août 1955 à Zurich.
Un combat très actuel, mis à l’honneur par une exposition
70 après sa disparition, son combat n’est pas mort. Il demeure, au contraire, très actuel, souligne Caren Heuer. Selon la directrice de la Buddenbrookhaus, maison natale de Thomas Mann reconvertie en Centre Heinrich et Thomas Mann, « son exhortation à ne pas se laisser piéger par les réponses simplistes et les séductions populistes n’a pas pris une ride. […] La démocratie a besoin de chacun d’entre nous, ou elle va à l’échec. C’est aussi vrai aujourd’hui qu’il y a un siècle ».
À l’occasion du 150e anniversaire de la naissance de Thomas Mann, la Buddebrookhaus présente une exposition sur le cheminement politique de l’écrivain au musée Saint-Anne de Lübeck jusqu’au 18 janvier 2026.
Elle retrace son itinéraire intellectuel du conservatisme monarchiste au républicanisme de raison puis à la défense fervente de la démocratie. Mais surtout, elle le fait parler directement à travers ses discours, ses articles, ses essais, ses journaux intimes, ses interviews et ses allocutions radiodiffusées. Le parcours s’organise autour d’un discours célèbre que Thomas Mann a prononcé à Chicago en 1950. Il s’intitule « Meine Zeit » (« Mon époque »). L’écrivain y prend clairement position contre « l’État total » et toute « dictature dogmatique ». À partir de là, l’exposition jette de nombreux ponts vers notre époque, tout en explorant la vie et l’œuvre de Thomas Mann.
Exposition de la Buddenbrookhaus au musée Saint-Anne de Lübeck du 6 juin 2025 au 18 janvier 2026
Exposition : à la découverte de Gabriele Münter
Pour la première fois en France, le Musée d’art moderne de Paris consacre une rétrospective à l’artiste allemande Gabriele Münter (1877-1962). Il invite à (re)découvrir cette figure éminente de l’expressionnisme dont l’œuvre couvre six décennies.
Elle sort aujourd’hui de l’ombre de Vassily Kandinsky, qui fut son compagnon de 1902 à 1916. Au début du 20e siècle, Gabriele Münter (1877-1962) a été une grande artiste d’avant-garde. Elle fut l’une des figures féminines du Cavalier Bleu (Blauer Reiter), le mouvement phare de l’expressionnisme allemand. Mais on réduirait à tort son œuvre à cette période. Pendant six décennies, cette femme indépendante, inventive et voyageuse a élaboré une œuvre foisonnante et d’une grande variété technique. On mesure de plus en plus son importance dans l’histoire de l’art. Le musée d’art moderne de Paris lui consacre une rétrospective, pour la première fois en France.
Une figure de l’expressionnisme allemand
L’exposition (« Gabriele Münter. Peindre sans détours ») présente 150 tableaux, dessins, gravures, photos et même broderies. Elle va de la fin du 19e siècle aux années 1950. Y figurent notamment les chefs-d’œuvre de la période du Cavalier bleu, dont le célèbre portrait de Marianne von Werefkin (1909). Mais la perspective se veut plus large.
Le parcours est chronologique. Il suit pas à pas la vie et la carrière de Gabriele Münter dans ce demi-siècle riche en mouvements historiques et artistiques. Il part à la découverte de la femme et de l’artiste en six grands chapitres. Il met l’accent sur des aspects parfois peu connus : les photographies, les séjours parisiens (1906-1907 et 1929-1930), le rôle du dessin dans l’œuvre, ainsi que les toiles emblématiques des années 1930 aux années 1950.
… et bien plus encore
Née à Berlin en 1877, orpheline à 20 ans, Gabriele Münter a commencé sa vie d’adulte par des voyages. De 1898 à 1900, elle part aux États-Unis, pays où ses parents ont vécu et où il lui reste un peu de famille. Elle sillonne plusieurs régions aux côtés de sa sœur et découvre la photographie. Elle prend quelque 400 clichés. Ils révèlent son don d’observation et surtout forment son œil.
De retour en Allemagne, elle s’installe à Munich, se forme à l’art et fait la connaissance de Kandinsky. Ensemble, ils entreprennent plusieurs autres voyages de 1904 à 1908, dont un second, quasi-initiatique, en Tunisie. Ils peignent côte à côte sur le motif.
Paris, une étape clé
En mai 1906, le couple entame un séjour de deux ans à Paris. C’est une période clé pour la formation de Gabriele Münter. C’est à Paris qu’elle expose pour la première fois et lance sa carrière. De retour à Munich, sa peinture exprime l’influence du fauvisme français, avec ses couleurs vives et ses formes simplifiées.
C’est à cette époque qu’elle cofonde la Nouvelle Association des artistes de Munich, puis le mouvement du Cavalier bleu (1911) avec Kandinsky et Franz Marc. Elle participe aux expositions du groupe et à son célèbre Almanach. Chez ces artistes expressionnistes, l’expression de l’intériorité prend le pas sur la représentation de la réalité.
Dans le Berlin des années 1920
De 1915 à 1920, Gabriele Münter s’exile en Scandinavie. À son retour, elle s’installe à Berlin où règne une nouvelle tendance de la figuration, la Nouvelle Objectivité (Neue Sachlichkeit). Gabriele Münter adopte dans son sillage des tonalités plus retenues. Elle met au centre de ses travaux la figure humaine.
Elle renoue aussi avec le dessin, une technique avec laquelle elle a toujours eu des affinités. Ses portraits frappent par leur concision : quelques traits lui suffisent pour saisir une posture, une personnalité, une situation. Elle réalise des portraits des femmes émancipées qu’elle croise à Berlin et à Paris, où elle effectue à nouveau un long séjour en 1929-1930.
L’année suivante, Gabriele Münter se fixe à Murnau, où elle possède une maison depuis 1909. Elle se laisse inspirer par les rues et les paysages de ce village pittoresque des pré-Alpes bavaroises. C’est le début d’une intense période de création de deux décennies. Même pendant le nazisme, l’artiste se fait discrète et réduit ses apparitions publiques. Mais elle continue de travailler à une œuvre dont l’importance ne cesse de se révéler.
A.L.
Gabriele Münter. Peindre sans détours.
Exposition au Musée d’art moderne de Paris du 4 avril au 24 août 2025
Visionner le documentaire d’ARTE « Gabriele Münter – Pionnière de l’art moderne » (jusqu’au 31.08.2025)
La vie de l’AFDMA
Lettre du Président au nouveau Bundeskanzlerkanzler, Friedrich Merz._05.2025 : cliquer sur le lien.
Remise de Prix de l’AFDMA au Collège Saint-Etienne à Strasbourg
Le Prix de l’Association française des décorés du mérite allemand (AFDMA) a été remis le jeudi 3 juillet 2025 au Collège Saint-Etienne à Strasbourg par le préfet honoraire de région Cyrille Schott, délégué pour l’Alsace de l’AFDMA, en présence de Fabrice Stengel, directeur de l’établissement.
Ce Prix, qui récompense l’intérêt et l’enthousiasme des jeunes pour l’Allemagne et la langue allemande, a été attribué à Maxime Dischler, né le 4 mars 2007 à Strasbourg et qui habite la Wantzenau.
Maxime Dischler a été proposé par ses professeurs pour ce prix en raison de ses résultats et de sa force de volonté. Celle-ci lui a permis de surmonter plusieurs troubles : dyslexie, dyspraxie, dyscalculie. Il a relevé avec succès les défis scolaires, avec un talent pour les langues. Il parle couramment le français, l’allemand et l’anglais. Il éprouve également une passion pour le sport, en particulier l’athlétisme. Après deux années de travail sans relâche et une belle culture générale, il a réussi son Abibac allemand avec brio. C’est un élève apprécié par ses enseignants et ses camarades de classe. Ouvert et équilibré, il établit facilement le contact. Son ambition est de poursuivre des études de droit à l’université de la Sarre.
La remise de ce Prix souligne le partenariat noué depuis une vingtaine d’années entre l’AFDMA et le collège Saint-Etienne.
Photo, de gauche à droite : Fabrice Stengel, directeur du Collège Saint-Etienne ; Laura Scholz, professeure d’allemand ; Maxime Dischler, qui reçoit le diplôme de l’AFDMA de Cyrille Schott, préfet (h.) de région, délégué pour l’Alsace de l’AFDMA ; Jan Seeger, professeur d’allemand-français en Bade-Wurtemberg, membre du jury de l’Abibac ; Pierre Huss, directeur adjoint du collège Saint-Etienne.
Dernière minute !
Le congrès annuel de la FAFA-VDFG aura lieu à Nantes du 17 au 19 octobre sur le thème :
La relation France-Allemagne : Tous acteurs.
Il est placé sous le Haut Patronage de l’Ambassadeur de la République Fédérale d’Allemagne en France.
Ce congrès franco-allemand s’appuie sur différentes personnalités du monde économique, politique, diplomatique, institutionnel, éducatif, académique, société civile… qui interviennent dans l’Espace Forum, les tables rondes, les ateliers et la conférence plénière finale de notre congrès.
Les tables rondes (sur des thématiques politique, économique, éducative et sociétale) et la conférence plénière sont modérées par des experts du franco-allemand.Les ateliers concernent les préoccupations des jumelages et apportent des éléments pour avancer dans nos différentes problématiques. Et aussi des espaces de networking pour se rencontrer, échanger, construire….
Vous trouverez le programme et la billetterie sur le site dédié : https://69e-congres-nantes.congres-fafa-vdfg.eu/.
Si vous êtes adhérents de la FAFA, vous bénéficiez d’un tarif d’inscription préférentiel.
En vous inscrivant avant le 30 juillet, les frais d’inscription sont également réduits.