Quelques observations au sujet de « l’accord Merkel-Macron ».

  1. Cet accord franco-allemand est très important pour le couple franco-allemand et l’Europe. Chaque partenaire ne peut oublier les intérêts de son pays et la vigilance de son opinion publique et de ses commentateurs. Ce qui est remarquable dans le couple franco-allemand, c’est que malgré cela, en raison d’une conviction européenne commune, il arrive  à formuler des propositions qui font avancer l’Europe. Ce que France et Allemagne ont mis sur la table sera évidemment débattu, mais ce qu’il faut relever, c’est qu’ils ont mis sur la table des propositions et eux seuls l’ont fait. A nouveau, le couple franco-allemand a montré son rôle central.
  2. L’Union européenne emprunterait pour alimenter son budget. Jusqu’à présent, le budget de l’UE est alimenté à plus de 70 % par les contributions des Etats et à moins de 30 % par des ressources propres. L’UE en s’est jamais vu reconnaitre le droit d’emprunter par les Etats membres, alors même que sa côte est très bonne et qu’elle pourrait emprunter à des conditions plus qu’avantageuses. Si cet élément est approuvé par le Conseil européen, c’est un pas historique dans le domaine budgétaire qui sera franchi. On peut penser qu’à terme, l’Union pourra emprunter comme un Etat, même si, dans l’immédiat, on va soumettre à restrictions ce droit d’emprunter
  3. Les réactions réservées de pays du Nord, comme l’Autriche, portent spécialement sur la façon d’attribuer les crédits du fonds de relance : sous forme d’aides non remboursables ou de prêts ; avec ou sans conditions. Les débats vont notamment porter là-dessus et finiront sans doute par un compromis, compréhensible. Les pays du centre et de l’Est voudront surtout obtenir la garantie que l’on ne va pas toucher aux fonds de cohésion qui vont vers eux. Là aussi, on trouvera la réponse.
  4. Si la proposition franco-allemande était retenue, le volume des aides accordées sous forme de dotation et non de prêts aux Etats doublerait la portée des fonds structurels européens, qui s’élevaient à 460 milliards environ sur la période précédente 2014-2020. Les critères d’attribution , selon la proposition privilégieraient les « Etats , régions , secteurs , les plus touchés par l’impact de la pandémie ».
  5. Il faudra voir aussi comment sera envisagé le remboursement des emprunts de l’UE. Evidemment, si l’Europe créait de nouvelles ressources propres, indépendantes des contributions des Etats – comme taxe plastique, taxe environnementale à la frontière, taxe sur les transactions financières,… – et à même de faciliter ce remboursement, la question serait simplifiée.
  6. Si l’on n’en est pas encore là, la commission évoque bel et bien le sujet. Attendons ! Comme je l’ai déjà dit, la crise fait avancer l’Europe…
  7. Reste aussi la question du montant du fonds de relance : 500 mds  + 500 Mds déjà décidés,  ce n’est pas rien, mais la Commission propose d’aller plus loin, avec des prêts. Donc, là aussi, il y a aura encore des débats.
  8. Les emprunts de l’Union créeraient la possibilité d’une dette publique propre à l’UE et d’un marché mondial des obligations en Euros, sans doute l’un atouts qui a le plus manqué pour affirmer le statut international de l’Euro.

Cyrille Schott

Ancien Préfet de Région, Directeur de l’Institut des Hautes Etudes de la Sécurité et de la Justice.

Délégué régional de l’AFDMA pour l’Alsace.