Retraites : le système allemand.

Le système allemand.

L’Allemagne est un pays pionnier en matière de prévoyance vieillesse. Son premier système obligatoire de retraite, financé par capitalisation pour une retraite à 70 ans, a été créé par Bismarck en 1883.

Aujourd’hui, le système de retraite allemand repose sur trois piliers :

  •  Un régime public par répartition (gesetzliche Rente). Obligatoire pour les salariés et certains indépendants, il est financé à parité par les cotisations des salariés et des employeurs (taux actuel de cotisation : 18,6 %) et par des subventions de l’Etat. C’est un revenu de base qui doit la plupart du temps être complété par une prévoyance complémentaire.
  • Des retraites complémentaires (individuelles ou d’entreprise), financées par capitalisation.
  • Des produits d’épargne et placements individuels.

A quel âge peut-on prendre sa retraite ?

  •  Initialement fixé à 65 ans, l’âge légal de départ augmente progressivement depuis 2012 pour les générations nées après 1949. Il atteindra 67 ans pour les personnes nées à partir de 1964 (sous réserve d’avoir cotisé au moins 5 ans). Il est actuellement de 65 et 7 mois pour les personnes nées en 1953.
  • A partir de 63 ans depuis 2014 pour les carrières longues (45 années de cotisation). Cet âge plancher doit être progressivement repoussé à 65 ans pour les personnes nées à partir de 1953.
  • Les départs anticipés / retardés donnent lieu à une décote/ à une surcote.

Calcul de la pension

Le système public par répartition fonctionne par points pour les salariés : une année de cotisation au salaire moyen donne droit à un point de retraite. Le total des points est multiplié par la valeur du point au moment du départ. On applique ensuite une décote ou une surcote s’il y a lieu.

Pour les fonctionnaires, le système fonctionne selon les mêmes règles mais par annuités. Il est financé directement par les fonds publics.

 Les principales réformes depuis 1992

Elles ont eu pour principaux effets d’augmenter la durée de cotisation et d’élever l’âge de départ à la retraite pour assurer l’équilibre financier du système de retraite par répartition.

1992 : Indexation des pensions sur l’évolution des salaires nets de l’année précédente, et non plus sur celle des salaires bruts.

Report progressif de l’âge légal de départ à 65 ans à partir de 2001 (au lieu de 60 ans ou 63 ans selon les cas).

Instauration d’un décote en cas de départ anticipé.

1999 : Report de l’âge légal de départ de 60 à 63 ans pour les personnes gravement handicapées.

Réforme des pensions d’invalidité.

Prise en compte de l’espérance de vie moyenne à 65 ans dans le mode de calcul des pensions.

2000 : Indexation des pensions sur l’évolution des prix et non plus des salaires.

2001 : Nouvelle révision du mode de calcul des pensions (prise en compte de l’évolution du taux de cotisation et du poids que représente pour les actifs la nouvelle retraite complémentaire privée).

2004 : Instauration d’un « facteur de durablité » dans le mode de calcul des pensions pour tenir compte de l’évolution du rapport entre le nombre de cotisants et le nombre de retraités d’une part, et de l’évolution de la conjoncture d’autre part. Une bonne conjoncture peut se traduire par une augmentation des pensions.

2007 : Report progressif de l’âge légal de départ de 65 à 67 ans pour les générations nées entre 1949 et 1964.

2014 : Amélioration des pensions pour les mères d’enfants nés avant 1992 (« Mütterrente »).

Création d’un droit au départ à 63 ans pour les longues carrières (45 années de cotisation). Cet âge sera progressivement repoussé à 65 ans pour les générations nées entre 1953 et 1954.

2017 : Création de la « retraite souple » (« Flexirente ») : liberté d’anticiper ou de retarder son départ à la retraite moyennant une décote/ surcote

Alignement complet des retraites des länder de l’Est sur celles des régions de l’Ouest à l’horizon 2025.

2019 : Incitation financière à cotiser pour une retraite complémentaire (à partir de 2020).

Projet de création d’une « retraite de base » pour les anciens salariés à bas salaire (en cours d‘élaboration)

La situation des retraités actuels

Selon la dernière édition du rapport de l’OCDE « Pensions at a glance 2019 », la situation de la plupart des retraités allemands est bonne. Leur revenu moyen des plus de 65 ans atteint près de 89% du revenu moyen (contre 87 % dans l’OCDE). Beaucoup ne tirent cependant pas l’ensemble de leurs revenus de la retraite par répartition.

La forte croissance économique des dernières années et la baisse du chômage ont cependant permis une évolution meilleure que prévu du système de retraite public. Les pensions ont connu une hausse régulière, et le taux de cotisation a été bien en-deçà de 20 %.

La situation des quelque 21 millions de retraités allemands se situe ainsi dans la moyenne des pays de l’OCDE. Le taux de remplacement (montant de la pension en proportion du dernier salaire) atteignait 52 % en Allemagne en 2018 (59 % dans l’OCDE).

Le rapport « Pensions at a glance » pointe cependant quelques faiblesses. L’écart des pensions entre hommes et femmes est élevé (46 % contre 33 % en France et 25 % dans l’OCDE) en raison du fort taux de travail à temps partiel des femmes allemandes. Le système de retraite est moins redistributif qu’ailleurs : le taux de remplacement est à peine plus élevé pour les bas salaires (56 %) que pour le reste des salariés (52 %). Dans l’OCDE, ces taux atteignent 59 % et 68 %. Enfin, seuls 50 % des indépendants sont assurés, contre 80 % en moyenne dans l’OCDE.

Les perspectives

Malgré le vieillissement de la population, le système de retraites allemand est bien financé. Les réserves des caisses publiques affichent en cette fin 2019 un montant record : 40,7 milliards d’euros, selon le dernier rapport du gouvernement allemand sur les retraites.

En hausse continue ces dernières années, les pensions vont par ailleurs connaître une nouvelle hausse au 1er juillet 2020 : + 3,15 % à l’Ouest et + 3,92 % à l’Est.

La démographie (voire la conjoncture ?) pourrait toutefois contribuer à une dégradation d’ici à quelques années.

Ainsi, le taux de remplacement (du dernier salaire) est soumis à un plancher garanti de 48 % jusqu’en 2025. Mais les projections du rapport du gouvernement sur les retraites indiquent qu’il pourrait baisser jusqu’à 45,7 % en 2030 et 44,5 % en 2033.

De même, le taux de cotisation actuellement bridé sous un plafond de 20 % pourrait dépasser cette barre dans les prochaines années.

Les débats et réformes en cours

A l’heure actuelle, la principale crainte concerne l’évolution du niveau de vie des retraités les plus modestes.

Pour éviter de voir resurgir la pauvreté du grand âge, la Grande coalition vient de s’accorder sur les principes d’une « retraite de base ».

Il s’agirait d’un complément de retraite pour les anciens salariés à bas salaire justifiant de 35 années de cotisation. Quelque 1,5 million de personnes pourraient en bénéficier à partir de 2021, estime le gouvernement. Une condition : un examen approfondi de l’ensemble de leurs revenus.

Le ministre allemand du Travail et des Affaires sociales, Hubertus Heil, défend cette « retraite de base » en expliquant que la société doit exprimer son respect aux retraités qui ont derrière eux une vie de travail.

Le projet est néanmoins controversé dans ses modalités pratiques. Il a suscité de nombreux débats tout au long de l’année 2019.

Preuve que le problème des retraités pauvres est dans l’air du temps, la Société pour la langue allemande (GfdS) vient d’élire le terme « Respektrente » (« une retraite respectueuse, digne ») « mot de l’année 2019.

A.L.

Publication Ambassade d’Allemagne.